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Discussion: Rousseau et le contrat social

  1. #1
    Masternono Guest

    Par défaut Rousseau et le contrat social

    bonjour

    voila, j'aimerais avoir quelques commentaires sur le contrat social pens***233; par Rousseau ou des points importants qu'il faudrait conna***238;tre.

    et puis quelques explication sur: sur LA RELIGION CIVILE

    Merci

  2. #2
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    L'idée de contrat social permet-elle de penser fondamentalement la politique?

    Tout dépend de l'idée , comme forme intellectuelle d'un objet, que l'on a de la politique qui est l'art de gouverner la cité, de diriger l'état...
    http://www.philagora.net/corrige2/etat-liberte.htm

    Oral bac = http://www.philagora.org/etoile/newsletter.htm
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  3. #3
    lucie1 Guest

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    Voici aussi un cours en plus de l'idée -fondamentale et très importante- développée par le site Philagora

    "Le contrat social". De Jean-Jacques Rousseau



    Introduction
    Par ces quelques mots : "je veux chercher si dans l'ordre civil il y a quelque règle d'administration légitime et sûre, en prenant les hommes tels qu'ils sont et les lois telles qu'elles doivent être", Jean-Jacques Rousseau ouvre l'un des livres qui a eu le plus de poids politique en cette période troublée que fut la Révolution Française, et qui conserve encore aujourd'hui son intérêt.

    Pourtant, ce philosophe né à Genève en 1712 et descendant, affirme t-il, en droite ligne de l'un des fils de Noé, n'avait qu'adressé ce livre à l'académie de Dijon, à l'occasion de son "concours" de philosophie. Nul doute qu'il ne doutât jamais du futur poids du "Contrat social".

    Pourtant, quel renouveau au sein même de la pensée politique, en cette période de bouillonnement intellectuel des Lumières ! Contrairement à Hobbes, différemment de Montesquieu, Rousseau propose les fondements de nos Etats modernes, et cela en un peu plus de cent pages. Comment organiser l'apport de cette oeuvre, quelles lignes directrices en retenir ?

    Il ne faut pas s'y tromper : Rousseau ne peint aucune société existante, mais au contraire part de ses pensées pour bâtir les préceptes d'un Etat tel qu'il devrait être. La démarche est normative. Ceci posé, on comprend qu'émergent deux thèmes-clés. Rousseau tente de nous montrer les modalités du passage des hommes isolés et vivant seuls, à l'Etat; en un mot la formation du corps social en réalité politique. L'Etat ainsi formé doit être conduit; c'est ainsi le vouloir et le gouvernement du corps social qui est à cerner. Mais qui peut prétendre à l'infaillibilité ? Sans tenter à aucun moment de remettre en question son irremplaçable apport, le "contrat social" prête le flanc à la critique, de par les apories le parcourant, et, indirectement, par les faux procès qui lui furent intentés.


    I) Des hommes à l'Etat, formation du corps social
    Comment passer de l'état de nature où les hommes vivent séparément, dans l'indifférence réciproque de leurs congénères, à un corps social organisé politiquement, c'est-à-dire à un Etat ?

    À la base de cette transformation se trouve la notion de pacte social. Déjà, Hobbes comme d'autres ont buté sur ce pacte, mais Rousseau donne à cette notion un contenu encore jamais imaginé.

    Il faut d'abord observer la distinction entre l'autorité naturelle et politique. À l'état de nature, le droit du plus fort est de règle et l'homme est naturellement inégal. Le fondement de l'autorité est uniquement la force - et cela suffit bien. L'autorité politique est tout autre, en ce qu'elle est fondée sur le droit. Notion abstraite, le droit est supérieur à la force. Mais, simple notion, le droit fait appel au consentement volontaire des individus. On voit ainsi que pour être légitime, tout contrat repose sur un acte volontairement consenti - y compris le pacte social.

    Les conditions de validité du pacte social ne se limitent pas au libre-consentement. Sur le plan formel, les consentants doivent implicitement jouir de leur liberté, et ont conscience d'accepter des obligations réciproques. Rousseau esquisse aussi des non-conditions disqualifiant les pseudo-pactes sociaux. Ainsi du pacte de soumission et d'esclavage de Grotius et Hobbes, contrat non-réciproque et privant de sa liberté. Sur le point du contenu, il est clair que sera nul tout pacte avilissant ou mortel.

    Le pacte social proprement dit. En somme, le pacte social devra inclure la sauvegarde de la liberté individuelle, prise dans sa première acception, à mille lieues de la définition qu'en donnera Kant. Le but du pacte social n'est autre que l'utilité. Abandonner sa liberté naturelle, liberté négative, au profit d'une liberté civile, ou politique, garantie par l'ensemble des contractants n'est pas évident. Mais Rousseau synthétise ainsi le pacte : "chacun de nous met en commun sa personne et toute sa puissance sous la suprême direction de la volonté générale; et nous recevons en corps chaque membre comme partie indivisible du tout." Instantanément, le contractant perd TOUT : possessions, liberté, droits. Immédiatement, il les récupère sous une autre forme, avec en plus pour ceux-ci la légitimité du pacte (garanti par l'intérêt collectif et indivisible de tous les contractants), et en échange il est tenu à un certain nombre d'obligations communes.

    À l'instant où est conclu le pacte, naît une personne morale, dotée d'un corps : les contractants. Ce corps, passif, est l'Etat. Actif, il est le souverain. En tant que partie de l'autorité souveraine, les individus sont citoyens, en tant que soumis à l'Etat, ils sont sujets, dans la terminologie de Rousseau.

    Isolément, chacun de ces termes a déjà été vu et conçu par les écrivains politiques ayant précédé Rousseau. Là où son "Contrat social" ouvre des perspectives radicalement nouvelles, c'est dans la conception et le rôle du souverain et de la volonté générale.

    La souveraineté, d'abord, doit être étudiée. Elle n'est en fait rien d'autre que l'exercice de la volonté générale, notion qui sera vue ensuite. Elle se résume donc à la force publique et n'est ni bonne ni mauvaise en soi. L'idée de souveraineté "du" peuple peut signifier que la souveraineté a sa source dans le peuple. C'est une conception ancienne déjà vue par Jurieu. Rousseau ajoute : cela signifie aussi que le peuple doit garder pour lui-même l'exercice de cette souveraineté.

    La volonté générale, elle, est la volonté qui conduit la force publique. Fondamentalement, cette volonté est juste, rationnelle. Il faut la distinguer de la volonté particulière (d'un individu) ou de l'addition de celles-ci, la distinguer aussi de la volonté de tous (intérêt commun). Dans l'idéal, cette volonté générale ne peut prendre de mesure injustifiée, et est conduite par le principe que ce qui est utile à chacun l'est à tous. "La volonté constante de tous les membres de l'Etat est la volonté générale, c'est par elle qu'ils sont citoyens et libres. (...) Quand donc l'avis contraire au mien l'emporte, cela ne prouve autre chose sinon que je m'étais trompé." Générale, cette volonté est indivisible et ne peut statuer sur des intérêts particuliers, ni se pencher sur quoi que ce soit d'individuel, ni se répartir en corps séparés ou spécialisés. C'est pourquoi, si elle est à la base des lois, les lois ne sauraient s'appliquer à un être précis. Un obstacle à rejeter absolument est logiquement une société partielle, où les intérêts ne seraient pas communs mais réservés à des groupe de motivations différentes. Le droit du souverain (donc, la souveraineté), même dans ces limites ainsi tracées, est encore borné : à l'utilité publique.

    En somme, Rousseau nous montre ici la façon dont devrait s'organiser une communauté en nation. Du groupe d'hommes à l'état de nature ou guère civilisé, par le biais du pacte social, on devient un Etat souverain, doté d'une volonté. L'Etat a donc un corps et une âme. Cette volonté est issue de la raison; le pacte est la seule association également profitable à chacun. Dans le champ de la pure pensée politique, comme dans celui de la politique bien réelle, on conçoit le poids de ces propositions, et le large écart entre ce modèle pensé parfait les Etats contemporains à Rousseau. Mais cette perspective est associée à une mise en garde : "Peuples libres, souvenez-vous de cette maxime : on peut acquérir la liberté, mais on ne la recouvre jamais." (II, 8).


    II) Conduire l'Etat : la volonté et le gouvernement du corps social
    Il est une limite à laquelle se sont heurtés nombre de penseurs du politique, celle de la définition de l'intérêt commun, et du choix en conséquence du gouvernement. On pourrait croire que ces premiers points du "Contrat social" ont fourni la réponse : le peuple est souverain, donc sa volonté général est légitime, donc il mène ses propres affaires. Erreur ! Ce n'est pas aussi simple. Rousseau démontre que la volonté générale ne peut pas gouverner, mais délègue son pouvoir.

    Pour voir cela, faisons une entorse à la logique du plan et traçons déjà la distinction des trois types de gouvernement possibles d'après Rousseau. Le premier est la démocratie où la majorité du peuple est gouvernement (nous reviendrons sur celui-ci). Le second est l'aristocratie où moins de la moitié du peuple dispose du gouvernement. Le troisième est la monarchie où le gouvernement est concentré en une seule personne. Le cas de la démocratie est particulier : ce régime est le seul où la volonté générale des citoyens est confondue (en termes d'hommes, mais pas dans un même temps de toutes façons) avec le gouvernement. En monarchie et en aristocratie, la plus grande partie de l'Etat n'y participe pas. Dans ce cas, la démocratie serait le modèle à appliquer partout et toujours ? Hélas, dit Rousseau, la démocratie nécessite la réunion fréquente de ses membres, la connaissance de tous par chacun, et surtout de parfaits législateurs et gouvernants ("Il faudrait des dieux pour donner des lois aux hommes", or : "S'il y avait un peuple de dieux, il se gouvernerait démocratiquement. Un gouvernement si parfait ne conviendrait pas à des hommes.")

    Pourquoi cette distinction entre le souverain et le gouvernement ? Simplement parce que la volonté du souverain, justement, est indivisible, inaliénable, et ne saurait errer. Qu'elle concerne un point particulier et que la volonté n'est plus générale : elle touche un point indifférent à la totalité du corps social, dépend d'exécuteurs, est susceptible de critiques.

    Du souverain et de la volonté générale découle immédiatement la loi, expression de celle-ci. La loi n'opprime pas, puisque l'oppression est toujours le fait de quelques-uns, et la loi émane de tous, pour tous. Si les individus réunis en souverain, ne peuvent errer, seuls, ils ne voient que leur intérêt immédiat, et la loi est là pour leur rappeler l'intérêt commun et, en fait, le leur aussi. La loi permet la liberté, qui la suit est libre... quitte à l'y forcer ! Il n'y a pas ici de contradiction.

    Donc qui exercera la loi ? Qui peut remplir la pénible tâche d'exécuter les commandements de la volonté générale au détriment de l'intérêt individuel et de corps ? Tel est le problème du gouvernement. Le souverain lui délègue son pouvoir (le respect qu'on lui doit et sa force) mais doit être prêt à le lui enlever à tout moment. Il ne s'agit que d'une délégation; toute autre transmission rendrait caduc le pacte social, par l'aliénation du souverain.

    La définition et le rôle du gouvernement sont donc particuliers à Rousseau. Le gouvernement est un corps intermédiaire entre le souverain et les sujets pour leur mutuelle correspondance, chargé de l'exécution des lois et du maintien de la liberté, tant civile que politique. Ses formes peuvent être multiples (on se rappelle les trois formes vues ci-dessus). En outre, d'après Rousseau, d'autres facteurs jouent comme la densité de la population, la surface du territoire, le climat, les besoins et habitudes du peuple qui s'est constitué en Etat.

    Le gouvernement dispose uniquement de la puissance exécutive. Son domaine est le particulier, sa référence le général. Rousseau distingue le prince du magistrat. Le premier est le corps du gouvernement, considéré comme un tout, une fonction, un être unique. Le second est partie du prince ou se confond avec lui. En monarchie, le prince est constitué d'un magistrat unique. En aristocratie, le prince compte quelques magistrats. La puissance législative a la mission de surveiller et au besoin renverser le gouvernement. Celui-ci doit de toutes façons changer périodiquement.

    Où s'arrête sa force ? Nulle part, dans la mesure où il applique seulement la loi qui est l'expression de la volonté générale, ne saurait errer et vise exclusivement le bien de tous. L'exercice qu'il pratique donc de la puissance législative est légitime.

    Dans ce cas-là il y a danger. Le prince doit être soumis uniquement à l'intérêt collectif, mais est aussi soumis, dans les faits, à l'intérêt individuel (personne du magistrat) et de corps (situation des magistrats). Gouverner est véritablement une tâche pénible, et non un privilège... à moins que le prince, lassé, en décide autrement et profite de son pouvoir sans contrepoids exécutif pour mettre à bas le pacte social. L'Etat peut périr par resserrement du gouvernement (passage de la démocratie à l'aristocratie, à la monarchie) ou par resserrement de l'Etat (le prince ne respecte plus les lois et opprime le souverain; il représente encore l'Etat avec quelques privilégiés, tandis que le peuple n'est plus qu'esclave.) Aussi, le gouvernement doit être suspendu le temps de la réunion du souverain.

    En somme, c'est un schéma politique nouveau que présente Rousseau. Le législateur est la volonté générale, issue du souverain. Mais elle ne saurait gouverner, ne pouvant avoir de caractère autre que collectif. Même en une démocratie, le peuple ne gouverne pas en même temps qu'il légifère. Mais le gouvernement qui est formé pour exécuter les lois n'a pas, absolument, de raison d'obéir, et peut privilégier son intérêt. Aussi, l'Etat tel qu'il doit être est fragile et demande une constante vigilance. De toutes façons, Rousseau sait qu'il traite des hommes, que l'Etat périra et que le souverain sera de nouveau usurpé. Mais il est possible de retarder au maximum ce moment, par de sages institutions. D'ailleurs, lorsque parut "Le contrat social", le monde devait encore apprendre à se libérer.


    III) Faux procès ou interprétations, et véritables apories
    Il est ici question des suites qui ont été faites au "Contrat social". En tant que texte de théorie de science politique, il a valeur en lui-même, mais aussi par l'écho qu'il a éveillé. On n'insistera pas sur l'écho dans les faits historiques qu'il rencontra. La statue de Rousseau à Paris, le transfert de son corps au Panthéon, le décret du 7 mai 1794 instituant les dogmes de la religion du vicaire savoyard en sont d'assez bons exemples. D'autres points sont plus intéressants en l'occurrence, en ce qu'ils restent davantage du domaine théorique. Deux traditions inverses se sont établies; les uns lisent dans le "Contrat social" l'apologie de la démocratie directe, de la bonté du peuple. D'autres y comprennent l'annonce de ce qui sera appelé au XXe siècle "régime totalitaire". En effet, coexistent l'idée de la justesse nécessaire de la loi, du caractère de la volonté générale, et l'affirmation que la vie de l'individu appartient à la communauté, que la censure est légitime en tant qu'elle est voulue par la volonté générale. Mais ces deux séries de conséquences, présentées soit comme procès, soit comme étude, négligent un fait fondamental. L'autorité n'est ni dans le peuple, dans sa réalité, ni dans le pouvoir politique, mais dans la raison éclairée par la conscience. Souverain en droit, le peuple en est digne s'il porte en lui la volonté générale, et non ses passions ou préjugés, même si l'on admet qu'il y a des chances pour que ces préjugés s'annulent et que de la majorité émerge la volonté générale. Quant au gouvernement, rappelons qu'il n'est légitime qu'autant qu'il applique une loi qu'il ne fait pas. Au contraire des faux procès attentés, Rousseau affirme que la Cité n'existe que par l'homme et pour l'homme. L'auteur du contrat social se contente de fournir les plans d'une machine, à ses successeurs de la faire marcher; c'est dans l'abstrait et les principes qu'il se limite volontairement.

    Si l'on ne peut reprocher au texte même les conclusions postérieures qui ont pu en être tirées, il n'en reste pas moins que certaines conclusions du "Contrat social" même sont proprement inacceptables. Du point de vue de la stricte démarche intellectuelle (raison pure), certains passages constituent de complètes apories : non pas une petite erreur mais une contradiction philosophique sans issue. Du point de vue moral (raison pratique), ces mêmes passages ou d'autres sont difficilement tolérables.

    Ainsi du paragraphe III, 15. Le début du paragraphe est parfaitement censé. Rousseau note que la paresse et la lâcheté, l'appât du gain, peuvent entraîner la chute de l'Etat. "À force de paresse et d'argent ils ont enfin des soldats pour asservir la patrie et des représentants pour la vendre. (...) Sitôt que quelqu'un dit des affaires de l'Etat : Que m'importe ? on doit compter que l'Etat est perdu." Mais Rousseau poursuit : "La souveraineté ne peut être représentée, par la même raison qu'elle ne peut être aliénée". Déjà, le lecteur est circonspect : sans doute voulait-on dire que seule la loi exprime la volonté générale ? Mais non : "À l'instant qu'un peuple se donne des représentants, il n'est plus libre; il n'est plus." C'est à dire que désigner des représentants pour qu'ils concourent à notre place à l'élaboration de la loi et à la réunion de souveraineté serait contradictoire avec la nature de la volonté générale. Si dans l'absolu l'argument a quelque valeur (toute représentation déforme), l'accepter condamne le reste du "Contrat social" à la théorie. Même, pourquoi en continuer la lecture : il traite de chimères ! L'homme est un dieu et vit en cercle réduit et en démocratie - ou bien alors il ne pourra jamais se constituer en une communauté d'êtres libres ?? Au contraire, la représentation concourt à éliminer les particularismes qui ne manqueraient pas de remonter en cas de démocratie directe.

    Autre point, le "Contrat social" donne aux hommes l'espoir de se libérer. Pourtant, par une certaine simplicité de l'argument (ou recherche de la formule ?) il fait parfois un usage assez désinvolte de cette liberté. Ainsi de la justification de la censure : "De même que la déclaration de la volonté générale se fait par la loi, la déclaration du jugement public se fait par la censure." Autre exemple, relatif à la peine de mort : " (...) qu'il soit puni de mort; il a commis le plus grand des crimes, il a menti devant les lois." C'est volontairement qu'aucun contexte n'est ici fourni. Ainsi, au nom de la loi souveraine, la vie d'un homme est portée à son terme. Or, qu'y a t-il à la base de la loi, sinon l'utilité publique. Certes, mais objecterait Rousseau le contrevenant aux lois menace les autres hommes. Donc une menace mérite la mort ? Surtout, quelles étaient les conditions de la mise en place du pacte social ? La liberté des contractants au moment de passer entre eux ce pacte. Et qu'apportait donc ce pacte en échange ? La garantie de la conservation de sa liberté civile. En somme, au nom de la sauvegarde des principes de la société, Rousseau en a bradé les fondements. Heureusement, ces erreurs ne compromettent nullement le texte dans son ensemble, mais seulement quelques points.

    Dernière aporie, l'idée d'établir une religion civile. Quelle contradiction ! Certes, la coutume est la loi la plus aisément admise, et plus forte à mesure qu'elle vieillit. Certes la religion, quant à elle, a une force qui prend à la fois pied dans le monde des âmes et dans l'Etat, d'où un fort pouvoir. De là, on peut comprendre, sans accepter cependant, qu'il soit tentant de concilier les deux : l'ancienneté de la religion et de la coutume, leurs domaines d'ancrage (et de persuasion) relatifs, donnent aux lois un caractère quasi-indestructible. Qu'on trouve une religion ayant des préceptes d'action propices à la vie de l'Etat, quel qu'en soit le dogme, et le tour serait joué. Est-ce si sûr ? Tenter d'établir civilement une religion revient à tenter de commettre l'action relevant le plus du particulier (déterminer les esprits) par une norme relevant du général : la loi. Cette loi qui ne peut que se réclamer de la volonté générale devrait être particulière selon chacun ? Devrait passer outre la liberté ? Une telle mesure ne relève pas du souverain, mais du despote. Et, après tout, elle est irréalisable.


    Conclusion
    Jean-Jacques Rousseau nous livre ici, malgré toutes les critiques, une oeuvre majeure de la pensée politique. Le corps social se forme librement, par un pacte destiné seulement au bien de tous, et qui n'aliène aucun; qui ne prive les contractants de ce qui leur est précieux. que pour le leur rendre immédiatement sous une forme plus solide et garantie par tous. Les modalités de l'établissement de ce pacte, les conclusions qu'en tire Rousseau quant à la nature et les motivations du gouvernement des hommes sont elles aussi d'une étonnante clarté, d'une évidence indéniable - un exemple qu'il serait difficile de ne pas tenter de mettre en pratique.

    Sa démarche est normative, en ce qu'il ne se préoccupe pas de partir du monde réel. Il part de la nature humaine, et trouve ce qu'il juge être le seul pacte social légitimement possible. Comme tout essai, celui-ci n'est pas exempt d'erreurs; et à vrai dire la critique est facile, plus de deux cent ans après la parution d'une oeuvre. Pourtant, il semble qu'ici le meilleur ait côtoyé le pire - les apories en sont, en profondeur dans l'absurde, largement à la hauteur de la valeur du reste du texte. Mais elles ne concernent que des points mineurs ou secondaires, tandis que l'apport du "Contrat social" est, lui, révolutionnaire.

    Notons enfin un certain humanisme de Rousseau, qui cherche avant tout à permettre de fonder une Cité préoccupée du bien de ses citoyens. Mais "Le contrat social" n'est pas un programme de réformes, plutôt une belle utopie. On peut reprendre le commentaire que fit Kant par-rapport à "La République" de Platon : il faut prendre ce maximum comme un archétype et se régler sur lui pour rapprocher toujours davantage la constitution légale des hommes de la plus grande perfection; en somme une idée justificatrice de la raison.

    Bonne chance
    Lucie

  4. #4
    puech Guest

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    Encore merci Lucie pour toutes tes infos tes explications claires sur Rousseau.
    Et aussi l'admin. bien sur.
    J'ai super bien réussi mes examens.
    Donc merci à tous. Je continue la philo et bien d'autres choses.

    A bientôt PARIS et bcp de boulot aussi mais j'aime ça
    Bizoux à tous (entre deux vagues, entre deux baignades)

  5. #5
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    Citation Posté par Masternono
    ... quelques explications sur: sur LA RELIGION CIVILE
    ROUSSEAU. La religion civile: un modèle à construire
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    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

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