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Discussion: les médias favorisent ils la démocratie?

  1. #1
    angelijoy Guest

    Par défaut les médias favorisent ils la démocratie?

    Ce sujet vient de tomber: je dois rendre un plan détaillé pour demain. S'il vous plait aidez moi!
    Merci

  2. #2
    géo Guest

    Par défaut

    Salut. Je te propose de lire ceci. C'est pas un corrigé c'est sur l'influence des médias à prendre en compte pour voir s'il favorisent ou non le rôle d ela démocratie.
    Pour la démocratie dans le moteur de recherche du site philagora tape le mot démocratie.

    Les " maîtres du monde ", auxquels s’adresse Pierre Bourdieu dans Le Monde du 14 octobre, maîtrisent-ils le monde des médias ?

    Introduction
    " Mastodontes de la communication ", " colosses des médias ", " maîtres du monde ", … A l’heure de la mondialisation des médias, les métaphores alarmistes abondent dans la presse pour dénoncer l’emprise exercée sur le monde des télécommunications par une poignée d’entreprises transnationales. En effet, les restructurations économiques et les fusions en chaînes concernent largement ce secteur polymorphe, aux contours peu définis, de la communication et des médias : sur les dix plus importantes OPA annoncées pour l’année 1999 dans le monde, cinq, dont les deux plus importantes, concernent les télécommunications !

    La concentration semble bien être la dynamique même du capitalisme mondialisé et globalisant de notre époque. Et les avancées technologiques jouant un rôle moteur dans le processus d’accumulation capitalistique, ces restructurations ne sauraient épargner l’univers de la communication et des médias, un des secteurs qui connaît les progrès les plus remarquables. Au contraire, on assiste depuis quelques années à la constitution de " consortium " : des groupes multimédias, voire " omnimédias ", de plus en plus gigantesques, cotés en bourse, concentrés et puissants à l’échelle nationale et internationale, dont les patrons, " nouveaux maîtres du monde ", seraient les vrais décideurs des affaires mondiales.

    Le risque qui découle de cette structure oligopolistique paraît grand : soumission de l’information, de plus en plus assimilée par l’idéologie dominante à un service quelconque, à des intérêts économiques et politiques d’une part, nivellement par le bas des produits culturels et destruction massive des identités par une industrie homogénéisante broyant les producteurs indépendants du monde entier d’autre part.

    Cette crainte anime notamment Pierre Bourdieu quand il s’adresse aux quelques 70 patrons de l’audiovisuel mondial réunis en octobre dernier à Paris : " réintroduire le règne du commercial dans des univers qui ont été construit contre lui, c’est mettre en péril les œuvres les plus hautes de l’humanité ". En prétendant placer devant leur responsabilités les grands manitous de la culture mondialisée, le sociologue cède t-il à la tentation idéologique de désigner les responsables d’une évolution culturelle mondiale qui se ferait par delà la capacité d’action des hommes ? Ou bien a t-il raison de postuler que le pouvoir décisionnel de ces patrons mondiaux est colossal, qu’eux en effet infléchissent dans un sens conforme à leurs intérêts (économiques, idéologiques) les orientations générales du monde des médias et des produits culturels ? Dans quelle mesure, en d’autres termes, maîtrisent-ils l’univers médiatique ? Et quels sont les contrepoids à cette domination économique des nouveaux barons de la communication ?

    I)"Le patron d’AOL nouveau maître du monde ", titrait Libération au lendemain de la fusion d’AOL, premier fournisseur d’accès Internet au monde, et de Time Warner, premier groupe mondial de communication. Avec cette transaction estimée à 280 milliards de dollars, la plus importante de l’histoire du capitalisme, le nouveau groupe concentrera des entreprises de presse, d’Internet, de télévision et de cinéma : après le règne des empires multimédias vient donc celui des " empires omnimédias ", prétendant produire un bien culturel et le diffuser sur tous les supports et tout particulièrement, via les réseaux câblés d’AOL, sur les réseaux Internet à haut débit. De la production à la diffusion, rien n’échappera désormais au nouveau groupe.
    "Nous allons fondamentalement changer la façon dont les gens acquièrent l’information ou communiquent entre eux ", prophétise Steve Case, président d’AOL-Time Warner et nouveau numéro 1 mondial des médias. Jusqu’à quel point les nouveaux maîtres du monde ont-ils les moyens de réaliser une telle prétention?

    Cette fusion historique offre un exemple quasi caricatural de la logique de fusions-acquisitions dans laquelle se sont récemment engagés les grands groupes de communication et de leur prétention à maîtriser non seulement les médias, mais aussi leurs modes de pénétration dans la société et les produits qu’ils diffusent. Le nouveau groupe cumule en effet les trois atouts de la Nouvelle Economie : une large base d’abonnés fidèles, une infrastructure technique à haut débit et des programmes de contenu. Une logique qui est au centre des grands groupes de communication mondiaux.

    La concentration n’est pas une donnée nouvelle de l’économie internationale, puisqu’elle a toujours été une dynamique inhérente au capitalisme. Mais, depuis les années 1990, les innovations technologiques et la libéralisation mondiale des échanges ont défini une nouvelle donne dans l’ économie des médias et de la communication. L’existence de " géants " ou " barons " de la communication est incontestablement une réalité. L’analyse du degré de leur contrôle et de l’intensité de leur maîtrise sur le monde des médias passe tout d’abord par un état des lieux des grands groupes en présence et des stratégies économiques qu’ils mettent en œuvre.
    Les entreprises médiatiques usent de stratégies communes à d’autres secteurs : diversification, concentration et internationalisation. Développer des produits de même type ou de type voisin permet, en amortissant les coûts de production, de réaliser des économies d’échelle. Dans une logique de diversification (ou d’intégration) verticale, l’entreprise cherche à contrôler l’ensemble de la filière : l’imprimeur peut vouloir éditer un journal (groupe Bertelsmann), un éditeur le distribuer (groupe Hachette). Sony, fabricant de matériel, s’est lancé dans la production et la diffusion de programmes, Canal + dans la production des décodeurs.

    Ce type de diversification est somme toute relativement classique, et la stratégie réellement nouvelle, générée par les avancées technologiques dans le secteur des télécommunications, c’est la diversification multimédias : il s’agit non seulement d’associer journaux, radios et télévisions, mais aussi d’opérer des glissements vers des voisinages culturels. Les grands groupes de l’écrit rapprochent la presse et l’édition de livres, de cassettes et de CD rom, la presse et la télématique ou Internet. Ceux de l’audiovisuel ont depuis longtemps rapproché la télévision et le cinéma. Un livre peut être décliné en série TV et en film, dont la bande originale sera vendue en CD et en cassettes, tandis que la promotion du tout s’effectuera grâce à la presse, à l’audiovisuel et avec le recours des sociétés de publicité : la performance d’un grand groupe est de plus en plus liée à sa capacité à contrôler un produit, depuis sa fabrication jusqu’à sa diffusion, et d’en assurer la promotion. La diversification permet ainsi d’assurer une certaine pérennité à un produit éphémère.

    La traduction financière de cette diversification est la concentration, qui peut à terme mener à la constitution d’oligopoles mondiaux ou régionaux, de groupes multimédias, de " géants " ou " barons " de la communication, dirigés par ces maîtres du monde interpellés par Pierre Bourdieu, lesquels sont tous américains, puis européens.

    Après AOL-Time Warner, vient le groupe Disney qui s’est transformé en véritable empire. Outre la production des dessins animés et des films exploités sur tous les marchés (disques, produits dérivés, jeux vidéos, …) et les parcs d’attraction (un tiers de son chiffre d’affaire), Disney a privilégié l’idée d’une intégration verticale qui irait de la création d’images à leur réception par le consommateur. Sa puissance augmente en matière de télévision :séries TV, chaîne thématique Disney Channel. En rachetant en 1995 le network ABC, reçu par 99 % des foyers américains, et qui dispose de plus de 230 chaînes locales affiliées et d’une vingtaine de radio, le groupe s’est considérablement renforcé, d’autant plus que la chaîne américaine est présente dans le câble avec ESPN 1 et 2, ce qui lui permet de diffuser ses programmes à l’échelle mondiale.

    Autre géant de la communication, le groupe du très controversé Rupert Murdoch, dont la presse constituait le socle, et qui depuis 1994 étend ses activités à la télévision et au cinéma (50 % de son chiffre d’affaire). Il possède le tiers du tirage des quotidiens britanniques(dont The Sun, 4 millions emplaires par jour), ce qui ne représente qu’une faible partie de News Corporation (10 milliards de dollars de chiffre d’affaire). Il contrôle aussi au Royaume-Uni 40 % de Sky Broadcasting (BskyB), réseau de télévision payante par satellite et par câble, et le premier bouquet de télévision par satellite dans le même pays. Aux Etats-Unis, News Corporation contrôle les éditions Harper & Collins (plus d’un demi milliard de dollars de bénéfices en 1995), le New York Post, le réseau de télévision Fox Network, … Sa présence est mondiale, puisque avec Star TV, il diffuse aussi vers le Japon, l’Inde, le sud-est asiatique et l’Est africain.

    Sur le vieux continent, l’Allemagne, la France et la Grande Bretagne dominent. Depuis 1994, les firmes allemandes s’affirment nettement. Deutsche Telekom, ZDF, Léo Kirch et surtout Bertelsmann, deviennent, avec des stratégies très offensives, des acteurs incontournables de l’industrie européenne, voire mondiale du multimédia. Bertelsmann, la plus importante maison d’édition du monde, est devenue en 1997 le numéro 3 mondial de la communication et le premier acteur européen de l’audiovisuel (fusion de son pôle audiovisuel UFA avec la compagnie Luxembourgeoise de Télévision, accord avec Deutsch Telekom et Kirch, …).

    En multipliant les prises de participations dans les secteurs voisins des activités initiales, les grands groupes de communication poursuivent deux objectifs essentiels pour leur survie sur un marché international hautement concurrentiel : atteindre une taille suffisante d’une part, et se diversifier dans tous les secteurs d’autre part. Ces desseins permettent de se prémunir contre les aléas du marché. Les entreprises de presse écrite, par exemple, fortement dépendante du cours du papier, n’ont d’autres options que d’investir dans des secteurs voisins et de se faire " multimédias ". Quand les grands groupes atteignent une position dominante, la question de leur maîtrise ne fait plus aucun doute.

    Une maîtrise qui est d’abord économique. Un groupe multimédia peut par exemple se permettre d’avoir une de ses activités déficitaire si des profits dans des secteurs voisins compensent ce manque à gagner. La récente guerre des prix qui a secoué le marché de la presse écrite britannique en est peut être le meilleur exemple : si R. Murdoch a pu baisser le prix du Times à 25 pence (moins de 2 francs), c’est parce que son empire multimédia lui permet d’accepter qu’un de ses journaux soit déficitaire s’il parvient à déstabiliser ses concurrents, The Daily Telegraph, The Independant et The Guardian notamment, qui ont du suivre ce mouvement à la baisse. Dans cette atmosphère de compétition implacable, la boulimie des grands groupes est une donnée structurelle, et la concentration apparaît comme la condition essentielle de toute entreprise de communication. Un mouvement amorcé tôt, et qui ne cesse de se préciser : rien que pour l’année 1993, l’Europe a ainsi connu 895 fusions de sociétés de télécommunication. L’écrasante majorité des activités médiatiques et de communication est aujourd’hui sous le contrôle économique des grands groupes, de la presse quotidienne et régionale aux chaînes de télévision nationale et internationale.

    Cette domination économique des grands groupes génère incontestablement une maîtrise plus large, politique, voire idéologique, qui est en fin de compte celle des magnats américains de la communication, et qui leur confère un pouvoir inégalé sur les affaires mondiales. Maîtrise de quelques hommes, donc, mais aussi domination d’un pays, d’une culture et d’un système de valeur à vocation universelle.

    II)La domination des Etats-Unis s’exerce sur l’Internet (les Etats-Unis abritaient 60% des serveurs en 1996), mais elle se ressent dans tous les domaines des médias, surtout dans celui de l’audiovisuel. Les Etats-Unis développent une stratégie offensive au sein des négociations commerciales internationales pour vaincre les dernières velléités de protectionnisme. Cette véritable guerre commerciale se livre particulièrement dans le domaine de l'audiovisuel et du cinéma, et surtout contre l'Europe. En décembre 1998, lors de la première offensive de son groupe sur le vieux continent, Rupert Murdoch déclarait : " Il faut aller là où est l’argent, et, sentiments mis à part, l’Europe représente 40% du marché des médias, les Etats-Unis 40 %, et le reste du monde 20 % ". En effet, le patron de BskyB est sur tous les fronts européens. En Italie, il a installé son bras armé sur le continent (News Corp Europe), tente de conquérir le marché du numérique (Stream), en même temps que celui, très juteux des droits de diffusion des matchs de football. En Allemagne, il cherche également à renforcer ses positions (il possédait déjà deux petites chaînes : Vox et TM3) en s’alliant avec Kirch.
    Les " produits US " sont certes servis par les progrès techniques (satellites et cassettes, et tout récemment CDRom et CDD). Mais l’essentiel découle de la hausse vertigineuse de la demande, résultant à la fois de la multiplication du nombre de stations émettrices tout autour du monde, et de l’allongement de la durée de leurs émissions, désormais assurées pour la plupart 24 heures sur 24. Comme, d’autre part, les coûts de production se sont envolés dans les années 1980 pour les marchés nationaux qui, en Europe, sont toujours étroits, les Américains en tirent un grand avantage, puisqu’ils peuvent vendre à bon compte au-dehors des images qui, à cause de l’ampleur de leur marché intérieur, sont pour la plupart déjà amorties. D’où une facilité de dumping pour gagner des marchés. Le déséquilibre entre l’Europe et les Etats-Unis est donc flagrant. Au début des années 90, les télévisions européennes consacraient entre 20 et 40% de leurs antennes à des productions américaines , un chiffre pouvant monter à 70% si l’on met à part information et " plateaux ". En 1994, selon l’IDATE (Institut de recherche sur l’audiovisuel et les télécommunications), les Etats-Unis ont exporté pour plus de 4 milliards de dollars de films et de " produits " de télévision en Europe, et n’ont importé en retour qu’à hauteur de 350 millions environ. 90% des oeuvres européennes ne dépassent pas les frontières des pays d’origine.


    Incontestablement, les produits américains, par leur efficacité, dominent le monde des médias. Cette domination, si elle n’est pas totale, est bien avancée. Et Washington, qui a fait preuve d’un remarquable sens de la prospective en agissant avec détermination pour assurer l’expansion d’un secteur en plein boom technologique, devenu l’un des piliers de l’économie, a bien compris tout le parti qu’il pouvait tirer de l’essor de ces grands groupes de communication, dont les intérêts rejoignent ses préoccupations politiques. Herbert I. Schiller parle d’ " un demi siècle d’initiatives et de politiques des gouvernements successifs pour assurer la domination mondiale des Etats-Unis dans le secteur, devenu très puissant, de la production, de la distribution, et de la diffusion culturelle ", d’une stratégie délibérée pour maîtriser la " société de l’information ", dont l’efficacité du secteur de la communication est la clé fondamentale, tant du point de vue industriel que symbolique. Au niveau des films (les USA dominent les 4/5 du cinéma mondial) et des programmes TV américains, la déferlante des programmes sur le monde constituent une fantastique OPA sur l’imaginaire mondial. Tous ces produits culturels fabriquent du " sentiment " américain, ils préparent le esprits au point de vue américain sur le monde, qui s’apparente à celui d’un feuilleton hollywoodien, comme l’a bien analysé Régis Debray. Les nouvelles technologies, notamment le satellite, " souvent analysé comme un véritable vecteur de colonisation économique et culturelle ", risque à terme d’accroître la domination anglo-saxonne sur l’Europe. Et les efforts américains pour faire admettre la conception " mercantile " du marché mondial des biens culturels servent immédiatement ces intérêts. D’où la déréglementation dont ils se font mondialement les chantres, ou le holà récemment mis par la FCC, sous la pression des principaux networkw, aux dispositions anti-concentration dans l’audiovisuel national.


    Cette domination des grands groupes sur le monde des médias, si elle rencontre les intérêts politiques des anglo-saxons et traduit leur domination culturelle mondiale, confère aussi aux " nouveaux maîtres du monde " un pouvoir colossal, économique certes, mais aussi politique et idéologique, qui parfois compromet le droit élémentaire du citoyen à une information de qualité.

    Chaque fait d’armes de Rupert Murdoch conforte la crainte qu’il suscite chez ceux qui sont attachés à la qualité de l’information. La trivialisation de la presse populaire britannique, de plus en plus portée sur les secrets d’alcôve, les potins politiques et versant souvent dans la xénophobie ou l’anti-communautarisme primaires, date du rachat en 1969 de News of the World et de son contrôle croissant par le magnat australien. Le renvoi en 1981 d’Harold Evans, rédacteur en chef du Times, trop ouvert aux thèses sociales démocrates et critique de la ligne thatcherienne, témoigne du pouvoir politique de M. Murdoch, qui s’est par ailleurs fait connaître peu après en brisant, avec le ferme soutien de la dame de fer, les syndicats des ouvriers du livre, liés au Parti travailliste. Les éditos du Sun contre les velléités européistes de Tony Blair concordent avec les positions de son propriétaire, qui s’élève régulièrement contre l’Institution communautaire et ses prétentions réglementaires. On pourrait multiplier à l’envi les exemples qui témoigne de l’intrusion de R. Murdoch dans le domaine de l’information et de la politique. Ultra-libéral et anti-marxiste viscéral, il n’en a pas moins réussi à s’entendre avec la Chine communiste pour y diffuser ses programmes depuis Hong Kong, via STAR TV, au prix il est vrai de l’élimination du bouquet numérique de la chaîne BBC World, plutôt mal vue par Pékin.

    Les ressorts de la manipulation de l’information par les grands groupes dans un sens conforme à leurs intérêts ont fait l’objet de diverses analyses. La guerre du Golfe a ainsi été l’occasion d’une intense activité de propagande. " La majorité des téléspectateurs américains ignoraient sans doute que chaque fois qu’un commentateur de la chaîne NBC s’extasiait devant les performances des missiles Patriot et Tomahawk, il ne faisait rien d’autre que l’éloge de la compagnie qui lui versait son salaire ", remarque Alain Woodrow. La chaîne NBC est en effet la propriété de General Electric, un des principaux fournisseurs de l’armée et ce n’est pas un hasard si, en 1991, elle avait le ton le plus guerrier. S’il ne s’agit pas directement de manipulation, l’ingérence des grands groupes dans le domaine des médias peut prendre la forme de l’obstruction de l’information, comme dans le bras de fer ente ABC et Philip Morris, accusé de manipuler les taux de nicotine par le network. Sur le point d’être acheté par Disney, et ne voulant risquer un procès qui aurait pu faire baisser sa valeur en bourse, " la chaîne opta pour un rectificatif public qui, tout en insultant la vérité, lavait le fabricant de tout soupçon ". Ce péril n’est pas limité aux pays de l’ultra libéralisme, et concerne également les nations européennes, plus régulatrices, comme l’a montré Serge Halimi pour le cas français.

    Cette domination économique des grands groupes dans le monde des médias revêt donc bien les allures d’une véritable maîtrise, puisque, en s’accaparant une large part de l’information mondiale, il dépassent le champ de l’économique. L’expression caricaturale de " maîtres du monde " n’est donc pas si loin de la vérité. Noircir totalement le tableau serait pourtant excessif.


    III)
    En effet, en Europe et en France particulièrement, l’économie des médias demeure une question complexe, qui ne saurait se caractériser par le seul jeu des grands groupes de communication. Des préoccupations d’ordre culturel ou politique (ainsi le rapport pouvoir-médias ou la place du service public) font que ce n’est pas encore l’empire de l’entertainment industry, dont quelques grands groupes aux motivations avant tout commerciales tirent les ficelles. Ainsi, si l’approche anglo-américaine des nouveaux maîtres du monde selon laquelle les médias sont des activités économiques comme les autres semble s’affirmer, elle reste en butte à la conception, plus européenne, selon laquelle les Etats et les pouvoirs publics ont encore un rôle important à jouer dans l’organisation des activités médiatiques.

    En 1993, lors de la phase finale du cycle de l’Uruguay du GATT, les créateurs avaient mis en avant une position neuve et constructive: " l’exception culturelle ". Une conception qui prétend exclure tous les biens culturels de la libéralisation croissante des biens et services dans le commerce intenational. L’Union Européenne a cependant limité d’emblée ses ambitions en se fixant seulement comme objectif à atteindre un " traitement exceptionnel et séparé " pour le secteur de l’audiovisuel. De fait, les discussions ont débouché sur une acceptation de l’intégration de l’audiovisuel aux services - et donc à terme aux règles du GATT, devenu organisation mondiale du commerce (OMC)- avec comme lot de consolation, un simple constat, nécessairement provisoire, de non-accord avec les Etats-Unis. Forts de cette première victoire stratégique, Washington et Hollywood entendent bien imposer un accord sur la base des principes énoncés dans un document intitulé US Global Audiovisual Strategy, dont les points-clefs étaient les suivants: éviter un renforcement des mesures restrictives (notamment les quotas de diffusion d’œuvres européennes et nationales); améliorer les conditions d’investissement pour les firmes américaines en libéralisant les régulations existantes ; lier les questions audiovisuelles et le développement des nouveaux services de communication et de télécommunications dans le sens de la déréglementation; multiplier les alliances et les investissements américains en Europe; rechercher discrètement l’adhésion aux positions américaines des opérateurs européens affectés par les quotas et les réglementations: télévisions privées, publicitaires, opérateurs de télécommunications. Cette stratégie porte ses fruits. C’est perceptible dans le blocage de toute amélioration des systèmes de protection européens, que traduit la nouvelle mouture de la directive communautaire Télévision sans frontières (seconde lecture d’octobre 1996). La Hongrie, la République tchèque, la Pologne, candidates à l’Union Européenne, négociaient avec elle des accords d’association transposant dans leur droit interne la directive TSF. Washington est intervenu, menaçant leurs gouvernements de s’opposer à leur entrée dans l’OCDE. Seule la Pologne a refusé de s’incliner. Pourtant, dans ces trois pays, la part de marché des films américains est déjà de supérieure à 90%. La démarche américaine se développe également dans les organismes internationaux. Dans le cadre de l’OCDE, l’Accord multilatéral sur l’investissement (AMI) vise à favoriser la circulation des investisseurs étrangers et à supprimer les subventions accordées aux seuls producteurs nationaux. Le gouvernement français s’est retiré des négociations, mais le même problème se pose dans le cadre du NTM (North Transatlantic Market). L’idée du traitement différencié des produits culturels a donc pour le moment essuyé un revers certain, mais la reléguer aux oubliettes serait une erreur, qui conforterait la conception mercantile de ces produits. L’échec de l’OMC à Seatle pourrait annoncer un retour à cette idée de " diversité culturelle ", mise à mal par ces initiatives américaines. Mais y croit-on vraiment ?


    La concurrence des groupes multimédias internationaux est une menace pour le secteur télévisuel public. Le problème est double. Il réside, d’une part, dans le difficile contrôle par les Etats de l’invasion de leurs ondes par les chaînes satellitaires.

    La première arme, toute naturelle, contre l’invasion des produits étrangers, est le protectionnisme. Mais fermer les frontières est compliqué, donc en général le protectionnisme intervient au stade de la diffusion. En Asie, le contrôle gouvernemental des médias allié à la censure font que la déréglementation ne conduit pas à une libéralisation simultanée de la diffusion télévisée. Arrivant comme un véritable défi en Asie, et inaugurant une révolution dans l’accès aux médias, STAR TV a reçu un accueil mitigé de la part de quelques pays asiatiques. La dénonciation de l’hégémonie américaine mais aussi le souci des différents gouvernements de contrôler la réception par antennes paraboliques offrant des images de " l’impérialisme occidental " en sont les principales explications. Les réponses les plus négatives ont été apportées par Singapour et la Malaisie qui ont décidé l’interdiction de capter les signaux satellitaires de STAR TV, d’autres ont soumis la réception de STAR TV pour les opérateurs à l’obtention d’une licence, organisant ainsi un contrôle du contenu : c’est le cas de la Thaïlande et de l’Indonésie. Un autre exemple est celui de la radio PAN (Assai Pacifique Network) financée par le Congrès américain, a été critiquée par certains gouvernements asiatiques et a du réorienter sa politique afin de sortit du cadre d’une " radio de propagande ".

    Une réglementation supranationale semble cependant la meilleure façon, désormais, de contrôler les diffusions transfrontalières. Ces dernières années une politique de réglementation audiovisuelle européenne est apparue indispensable pour les Etats-membres de l’Union Européenne face à l’apparition du satellite et du câble, ces nouveaux médias se révélant du fait de leurs technologies et de leur contenu, incontrôlables par des régulations prises au simple niveau national. La tentation est grande, pour une entreprise soumise à une loi qui dessert ses intérêts, de se placer sous l’emprise d’une loi étrangère plus douce. Le problème réside d’autre part dans la dépendance où se trouvent les chaînes publiques par rapport aux productions télévisées internationales pour alimenter leurs écrans.

    Les groupes multimédias internationaux ont pu être perçus comme des éléments de subversion des politiques télévisuelles publiques, ces dernières étant jusqu’ici centrées autour de concepts de préservation de leur identité culturelle. Par exemple en ce qui concerne la radio, il est possible de relever une sorte de mondialisation des programmations, avec le poids de la production anglo-saxonne. Sur cette question, le Parlement français devait réagir en imposant, début 1996, des quotas de programmation de chansons francophones, (40%) pour les radios françaises. Il faut toutefois remarquer qu’ " uniformisation " ne signifie pas uniquement " américanisation ", car les instruments réglementaires inventés par les Européens pour se protéger des invasions du " software " étranger favorisent des projets de coproductions internationales télévisées ou cinématographiques dont on pourrait dire qu’elles vont également dans le sens d’une dilution du caractère national et identitaire des productions européennes.

    L’activité diplomatique dépensée pour fixer un cadre réglementaire international aux diffuseurs de télévisions hertziennes, satellitaires et par câble ont abouti en 1989 à une Convention européenne sur la télévision transfrontalière proposée aux Etats par le Conseil de l’Europe. La directive européenne dite " Télévision sans frontières " qui date d’octobre 1989 pose certes le principe d’une majorité de programmes en provenance de l’UE mais avec cette restriction " chaque fois que c’est possible " qui en limite grandement la portée. Le protectionnisme s’installe de toute façon dans une position défensive et à certains égards frileuse. D’où la nécessité d’inventer des répliques offensives et l’espoir d’une coopération positive, telles que les coproductions. Le danger des coproductions est pourtant d’aboutir à des mélanges aseptisés, où chacun s’éloigne de ses racines. Certes, on peut privilégier les oeuvres binationales mais cela ne va pas très loin. Un autre exemple de coopération est Arte qui touche (potentiellement) 10 millions de téléspectateurs câblés outre-Rhin et la grande majorité du territoire français. La coopération a vocation à s’élargir, à terme à d’autres partenaires de l’UE. Deux obstacles majeurs s’opposent à l’européanisation d’Arte : les droits d’auteur et les langues. Mais l’Arte européenne serait aisément modulable : Arte téléchargée dans une version originale et sous-titrée ou parfois doublée sur place, par le service public de chaque Etat. Olivier du Payrat écrit: " en Europe, notre force, c’est la marge : autant de pays, autant de différences, autant de possibilités d’ouverture et d’enrichissement par la diversité, contre l’uniformité. C’est donc cette marge qu’il faut valoriser, promouvoir, mettre en avant plutôt que de venir combattre de front, et dans leur pré carré, les produits américains au savoir faire inégalable. C’est cette marge qui constitue notre avantage compétitif ".

    Conclusion
    Les quelques exemples qui précèdent montrent en quoi une action réglementaire est nécessaire pour contrecarrer l’influence des maîtres du monde dans le secteur des médias. L’américanisation du monde des médias est pour l’heure en bonne voie, et l’industrie de l’intertainment, les forces du marché aidant, fait de plus en plus d’émules. Sous la pression des intérêts économiques et idéologiques, les Etats européens sont en train d’abandonner une importante part de leurs prérogatives et de leurs prétentions en matière de culture. Les inquiétudes de Pierre Bourdieu sont plus que jamais fondées. L’importance des médias est telle que ce débat sur leur maîtrise par des géants économiques concentrent toutes les interrogations sur la mondialisation et ses conséquences sur nos libertés.

    A+ Géo

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