Une balance intérieure:

Le verbe penser a une origine latine: pensare signifie peser. Peser c'est déterminer un poids par un rapport à un autre poids connu.

Au sens propre cela revient à comparer, à mesurer, à peser. Dans tous ces actes, il y a un projet de vérité, d'ajuster correctement une mesure à des objets donnés. Ce projet de vérité se retrouve dans tout acte de penser.

Au sens figuré cela revient à donner une valeur à un jugement: Ce n'est pas n'importe quel jugement spontané car on a pesé le pour et le contre ce qui permet de se déterminer pour ce qui a le plus de valeur. Penser devient alors un acte, un mouvement animé par le souci de justice: un bon juge n'est-il pas celui qui écoute chaque partie avant de choisir, de décider pour ce qui lui paraît fondé en raison.

Ainsi, dans une dissertation, le mouvement de la pensée se dirige vers un jugement éclairé (troisième partie) en instaurant une démarche de dialogue qui permet de peser le pour et le contre ( deux premières parties ). C'est le plan dialectique qui est "la voie royale de la dissertation" selon Jacqueline Russ. Mais ce mouvement est la conséquence d'un dialogue intérieur dans lequel vous vous interrogez en interrogeant et en répondant.

C'est l'acte de penser dans lequel c'est le même qui interroge et qui répond, qui sait poser le problème et chercher une réponse, une solution, adéquate, bien ajustée à ce qui est et justifiable par des raisons. Penser c'est donc bien s'orienter vers la vérité et vers la justice.

Parce que ce mouvement a pour origine le sujet, en toute rigueur, on ne peut donc penser que par soi même. Répéter le mouvement accompli par un autre, ce n'est pas penser mais comprendre le sens, la signification et l'orientation d'un acte effectué par un autre. Voilà pourquoi copier les plus sublimes pensées, ce n'est pas penser, c'est saisir une pensèe.

En réfléchissant sur ce qui vient d'être dit, vous devinez comme un fait peu contestable que nous pensons en nous parlant intérieurement, et que, sans cet échange, cette balance intérieure, nous ne penserions pas.

Comment penser à l'arbre en général sans le concept (ce avec quoi je prends une diversité sensible, par exemple des images d'arbres que je vois et qui sont distinctes) , le mot qui prend ensemble la totalité des arbres par l'abstraction de quelques caractéristiques communes?
Si bien que, quand je ne pense pas je ne me parle pas, et quand je ne me parle pas, je ne pense pas.

Demander brusquement à un proche: à quoi penses-tu? C'est toujours lui demander: quel discours intérieur es-tu en train de conduire?

A SUIVRE