+ Répondre à la discussion
Page 2 sur 8
PremièrePremière 1 2 3 4 5 6 7 8 DernièreDernière
Affichage des résultats 11 à 20 sur 78

Discussion: « SERVITUDE ET SOUMISSION » La Boétie, Montesquieu, Ibsen...

  1. #11
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut

    La Boétie s'oppose à la tyrannie et non à un état de droit ., même si une loi est injuste. (j'y reviendrai) Il n'a rien contre l'ordre.Il n'y a point de liberté sans lois , la pire des lois est préférable à l'absence de lois.
    La tyrannie est une idolâtrie.
    J'y reviens avec Rousseau:


    Sur gouvernement et rôle pédagogique des lois:
    ROUSSEAU, Émile - Livre V

    Avant tes voyages, je savais quel en serait l'effet; je savais que en regardant de près nos institutions, tu serais bien éloigné d'y prendre la confiance qu'elles ne méritent pas. C'est en vain qu'on aspire à la liberté sous la sauvegarde des lois. Des lois! où est-ce qu'il y en a, et où est-ce qu'elles sont respectées? Partout tu n'as vu régner sous ce nom que l'intérêt particulier et les passions des hommes. Mais les lois éternelles de la nature et de l'ordre existent. Elles tiennent lieu de loi positive au sage; elles sont écrites au fond de son coeur par la conscience et par la raison; c'est à celles-là qu'il doit s'asservir pour être libre; car il n'y a d'esclave que celui qui fait mal, car il le fait toujours malgré lui. La liberté n'est dans aucune forme de gouvernement, elle est dans le coeur de l'homme libre; il la porte partout avec lui. L'homme vil porte partout la servitude. L'un serait esclave à Genève, et l'autre libre à Paris.

    "Si je te parlais des devoirs du Citoyen, tu me demanderais peut-être où est la patrie, et tu croirais m'avoir confondu. Tu te tromperais, pourtant, cher Émile, car qui n'a pas une patrie a du moins un pays. Il y a toujours un gouvernement et des simulacres de lois sous lesquels il a vécu tranquille. Que le contrat social n'ait point été observé, qu'importe, si intérêt particulier l'a protégé comme aurait fait la volonté générale, si la violence publique l'a garanti des violences particulières; si le mal qu'il a vu faire lui a fait aimer ce qui était bien, et si nos institutions mêmes lui ont fait connaître et haïr leurs propres iniquités? Ô Émile! où est l'homme de bien qui ne doit rien à son pays? Quel qu'il soit, il lui doit ce qu'il y a de plus précieux pour l'homme, la moralité de ses actions et l'amour de la vertu. Né dans le fond d'un bois il eut vécu plus heureux et plus libre; mais n'ayant rien à combattre pour suivre ses penchants il eut été bon sans mérite, il n'eut point été vertueux, et maintenant il sait l'être malgré ses passions. La seule apparence de l'ordre le porte à le connaître, à l'aimer. Le bien public, qui ne sert que de prétexte aux autres, est pour lui seul un motif réel. Il apprend à se combattre, à se vaincre, à sacrifier son intérêt à l'intérêt commun. Il n'est pas vrai qu'il ne tire aucun profit des lois; elles lui donnent le courage d'être juste, même parmi les méchants. Il n'est pas vrai qu'elles ne l'ont pas rendu libre, elles lui ont appris à régner sur lui."



    ROUSSEAU, Emile- Livre V - PLéiade (pages 855, 858): fonction pédagogique des lois ,même injustes:
    Dans le cours de son oeuvre, Rousseau distingue deux formes de contrat social:

    Celui du deuxième discours a pour origine l'invention d'un riche: seul contre tous il a l'idée d'utiliser les forces des pauvres pour défendre sa possession: il invente la loi qui énonce des conduites.

    Le contrat social a pour origine la raison, la production d'un être de raison: la loi avec sa double universalité (pour tous et par tous), source d'égalité et de liberté: l'auteur, c'est Rousseau qui se situe à l'autre bout de l'histoire.
    Mais distinguer ne revient pas à opposer radicalement les deux contrats: ils naissent en effet d'une même situation, l'état de guerre, et ont pour origine l'art comme réflexion qui "prend la relève de la nature" (Goldschmidt, Anthropologie et politique, page 571). Dans les deux cas il s'agit bien d'unir et de diriger les forces, dans le premier contrat en faveur du riche et dans le second en faveur du bien commun.

    Ce qui les distingue apparaît clairement dans ce texte d'Émile: dans son voyage, Émile n'a pas vu, n'a pas rencontré ce qui doit être et le visible le fait désespérer de l'intelligible: ce qui doit être n'existe pas et ce qui existe n'est pas conforme à ce qui doit être. Or Rousseau sait que l'existence se joue toujours dans une société au point que le besoin d'autrui est facteur de moralité en tant que révélateur des virtualités humaines. C'est sous le premier contrat social, Émile l'a constaté, que l'existence se déploie. Si le discours du riche et sa conséquence sont préférables à l'état de guerre c'est que dans le premier contrat social, celui du riche, en lui même il y a une positivité par laquelle il participe au "vrai" contrat social.

    C'est la positivité, l'ordre: toute loi porte une marque qui la fait être loi, quel que soit son contenu: une marque de participation à l'essence de la loi: si elle énonce des conduites, elle participe au vrai contrat social.

    La distinction ne doit donc pas aller jusqu'à opposer radicalement les deux contrats et le débat sur le vrai et sur le faux contrat social perd de son intérêt puisque c'est le fait de vivre dans une société civile qui importe.


    Cela nous aide à comprendre la pensée de La Boétie et son évolution => Il faut obéir aux lois de son pays, même si elles sont relatives et parfois injustes.
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  2. #12
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut « SERVITUDE ET SOUMISSION » Construisons une grille de lecture

    Voir le post suivant.
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  3. #13
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut

    Commençons par un exemple: paradoxalement cela nous fera gagner du temps. Cet exemple jouera, en quelque manière, le rôle d'un paradigme.

    On entend parfois dire:
    " On lui doit aide et assistance".

    aide et assistance. impossible de compter car les deux termes n'ont pas le même sens.
    l'aide consiste à joindre ses efforts aux efforts de quelqu'un.
    L'assistance a plutôt une connotation économique.

    Rapport entre les deux. Il manque quelque chose à l'une, l'autre comble ce manque.

    Nous nous demanderons : qu'e'st-ce qui manque à la servitude que la soumission apporte?
    Et cela nous permettra de comprendre ce que nous devrons ne jamais perdre de vue dans la lecture des trois ***339;uvres.

    Alors parler de Montaigne sera oiseux si ça ne concerne pas le thème. Oiseux est toujours dangereux pour un prépas scientifique.
    Vous voyez que par ce petit détour nous avons gagné beaucoup de temps.

    Passons maintenant à « SERVITUDE ET SOUMISSION »
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  4. #14
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut « servitude et soumission »

    Le thème met dans l'espace ce qui ne se compte pas. "et" juxtapose pour nous faire voir la différence et l ' adjonction

    D'après le post précédent nous pouvons répondre à la question: qu'est-ce qui manque à la servitude pour que le tyran puisse compter sur elle?

    La servitude est un esclavage contraint par le regard du maître. La liberté explose dans le for intérieur et lorsque la contrainte disparaît. Ce qui manque à la servitude c'est la continuité dans le temps. Quand le chat n'est pas là, les souris dansent.

    Qu'apporte la soumission? C'est la continuité car, étant volontaire,son origine n'est autre que la volonté.Elle demeure en l'absence du tyran. Étonnant paradoxe , la liberté peut se nier elle-même! Comment cela peut-il être?
    Nous pouvons maintenant lire les trois o euvres sans pour cela perdre jamais de vue « SERVITUDE ET SOUMISSION »

    A suivre
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  5. #15
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut

    Et si c'était un sujet?
    Proposition de plan:
    1) Ressemblance
    2 Différence
    3) Rapport
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  6. #16
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut

    Vous avez maintenant une grille de lecture qui vous permet de ne prendre en note que ce qui intéresse le thème:


    Servitude et soumission


    Ressemblances: ..... Différences:........


    Rapport:........

    Vous pouvez utiliser la grilles pour les trois œuvres

    Bonne et fructueuse lecture......

    Vu?

    Joseph
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  7. #17
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut Un exemple...

    Par exemple: j'ai lu et pris sur la grille: dans "la servitude volontaire":
    "Il n'est pas croyable comme le peuple, dès lors qu'il est assujetti ,tombe si soudain en un si prochain oubli de la liberté qu'il n'est pas possible qu'l se réveille pour la ravoir r" La Boétie, Discours sur la servitude volontaire (en 1571)


    Je trouve vers la fin de Henrik Ibsen, Une maison de poupée, un réveil d'un personnage féminin qui reprend sa liberté, en dépit de la servitude volontaire des femmes. (cherchez une citation). J'ai aussi noté toutes les pressions sur Ibsen pour que la femme revienne au foyer à la fin et mesuré la force de la servitude volontaire, sur les imbéciles!
    Dans la citation de La Boétie je remplace peuple par femme. Merci de le faire.

    =>dans une maison de poupée: http://forum.philagora.net/showthrea...isons-ensemble

    =>dans les Lettres persanes
    Chiche.

    Que je le trouve ou pas je suis bien parti!
    A suivre
    Joseph
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  8. #18
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut Une maison de poupée? Lisons ensemble

    Comparons deux passages:
    1) Au début
    Nora: Mon Dieu! Quelle joie que d'y penser tranquille: tranquille, pouvoir être tranquille, tout à fait tranquille! Jouer avec les enfants, bien arranger la maison, avec goût , comme Torwald peut le désirer. Puis viendra le printemps, le beau et ciel bleu. Peut-être alors pourrons-nous un peu voyager . Retourner voir la mer! Oh!Quelle chose adorable de vivre et d'être heureuse!

    Acte 1, scène 4
    Acte 1, scène 4

    2) Bien plus tard
    Nora: Mon Dieu ! tu l'as très bien dit. C'est pour moi une tâche hors de portée. Il en est une
    autre dont je dois m'acquitter d'abord. Je veux songer avant tout à m'élever moi-même. Tu n'es
    pas homme à me faciliter cette tâche. Elle ne relève que de moi. Voilà pourquoi je vais te quitter.
    De la passivité à l'acte. De la soumission à la liberté, la création de soi par soi: la vraie vie.
    Utilisons notre grille:

    Ressemblances:
    même locuteur: Nora
    Même début: Mon Dieu!
    Il s'agit de " tâches", voulues par son mari, à réaliser. Servitude et soumission.

    Il s'agit de joie, d'être heureuse(tranquille) mais à quel prix?



    Différences:

    Nora suivait les désirs de Torwald, maintenant elle suit son désir, passer de la puissance à l'acte!
    Il s'agit de tâches accomplies par une épouse soumise par la passion:"comme le veut Torwald" ,= suite de tâches passives, à attendre le changement qui vient de la nature .Le retour du même. Tout au plus Nora n'ajoute que des formes nouvelles à l'ancien. (" avec goût")
    Style, et sentiments.
    au début: le co eur, le sentiment, l'art qui voile la vérité, la contemplation...
    Vers la fin de la pièce: La rigueur d'une démonstration imparable et implacable.
    Ce qu'elle accorde : Torwald pris aux mots. Le travail quotidien sera aussi bien fait par une personne quelconque. => ce qu'est la tâche qui lui est propre => Son mari n'est pas du genre à la lui faciliter=> car la tâche ne relève que d'elle=> C'est pourquoi elle va le quitter. Cela claque comme une porte qui se referme.


    alors que ,vers la fin de la pièce, la tâche vient d'elle et a pour objet Nora elle même: "s'élever". Une tâche propédeutique à toutes les autres. Choisir et de ce fait se choisir. S'élever signifie, à la fois, grandir, devenir autonome, mettre en acte la liberté restée en puissance sous la triple tutelle de la société, du mari et de la langue.

    Rapport
    De la soumission volontaire à la liberté.
    De la puissance à l'acte.
    Du sommeil de la raison à son éveil


    "On appelle liberté le rapport du moi concret à l'acte qu'il accomplit" (Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience p.165).
    A suivre
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  9. #19
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut

    Une clé:

    "La passion ... trouve son plaisir et son contentement dans le sentiment de la servitude. Et, comme la raison ne cesse cependant pas de faire appel à la liberté interne, l'infortuné soupire dans ses fers, sans toutefois pouvoir les briser, parce qu'ils se sont pour ainsi dire soudés avec ses membres." Kant , anthropologie
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  10. #20
    Date d'inscription
    April 2001
    Localisation
    France -
    Messages
    21 954

    Par défaut Lettres Persanes: lisons ensemble.

    Le roi de France est le plus puissant prince de l'Europe. Il n'a point de mines d'or comme le roi d'Espagne son voisin; mais il a plus de richesses que lui, parce qu'il les tire de la vanité de ses sujets, plus inépuisable que les mines. On lui a vu entreprendre ou soutenir de grandes guerres, n'ayant d'autres fonds que des titres d'honneur à vendre; et, par un prodige de l'orgueil humain, ses troupes se trouvaient payées, ses places munies, et ses flottes équipées.


    D'ailleurs ce roi est un grand magicien : il exerce son empire sur l'esprit même de ses sujets; il les fait penser comme il veut. S'il n'a qu'un million d'écus dans son trésor et qu'il en ait besoin de deux, il n'a qu'à leur persuader qu'un écu en vaut deux, et il le croient. S'il a une guerre difficile à soutenir, et qu'il n'ait point d'argent, il n'a qu'à leur mettre dans la tête qu'un morceau de papier est de l'argent, et ils en sont aussitôt convaincus. Il va même jusqu'à leur faire croire qu'il les guérit de toutes sortes de maux en les touchant, tant est grande la force et la puissance qu'il a sur les esprits.


    Ce que je dis de ce prince ne doit pas t'étonner : il y a un autre magicien plus fort que lui, qui n'est pas moins maître de son esprit qu'il l'est lui-même de celui des autres. Ce magicien s'appelle le pape : tantôt il lui fait croire que trois ne sont qu'un; que le pain qu'on mange n'est pas du pain, ou que le vin qu'on boit n'est pas du vin, et mille autres choses de cette espèce. (lettre 24.)
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

+ Répondre à la discussion

Règles de messages

  • You may not post new threads
  • You may not post replies
  • You may not post attachments
  • You may not edit your posts