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Discussion: Texte de Leibniz sur l'origine des idées

  1. #1
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    Par défaut Texte de Leibniz sur l'origine des idées

    "... il y a une lumière née avec nous. Car puisque les sens et les inductions ne nous sauraient jamais apprendre des vérités tout à fait universelles, ni ce qui est absolument nécessaire, mais seulement ce qui est, et ce qui se trouve dans des exemples particuliers, et puisque nous connaissons cependant des vérités nécessaires et universelles des sciences, en quoi nous sommes privilégiés au-dessus des bêtes : il s'ensuit que nous avons tiré ces vérités en partie de ce qui est en nous. Ainsi peut-on y mener un enfant par de simples interrogations à la manière de Socrate, sans lui rien dire, et sans le rien faire expérimenter sur la vérité de ce qu'on lui demande. Et cela se pourrait pratiquer fort aisément dans les nombres, et autres matières approchantes.

    Je demeure cependant d'accord que, dans le présent état, les sens externes nous sont nécessaires pour penser, et que, si nous n'en avions eu aucun, nous ne penserions pas. Mais ce qui est nécessaire pour quelque chose, n'en fait point l'essence pour cela. L'air nous est nécessaire pour la vie, mais notre vie est autre chose que l'air. Les sens nous fournissent de la matière pour le raisonnement, et nous n'avons jamais des pensées si abstraites, que quelque chose de sensible ne s'y mêle ; mais le raisonnement demande encore autre chose que ce qui est sensible."

    Leibniz
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  2. #2
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    Pour une accroche (intro)


    = D'où viennent les idées? L'opinion, qui ne réfléchit pas, répondra: les idées sont des formes atténuées des impressions sensibles.
    Pourtant l'esprit développe des virtualités qui n'ont rien à voir avec la particularité des expériences.

    D'où lui vient la raison et ses grands principes: on ne voit jamais l'identité, la causalité, la contradiction? C'est l'esprit qui y accède par sa propre activité.

    Entre ceux qui disent que les idées viennent de l'expérience et ceux pour qui les idées sont innées, Leibniz, pour ainsi dire ,s'interpose et reconnaît à chacun une part de vérité.
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  3. #3
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    = Lisons le texte ensemble:

    lumière: il y a en nous des idées qui nous permettent de saisir les raisons du changement que nos sens nous révèlent. Ces idées permettent à notre esprit d'agir, c'est à dire d'accéder aux raisons, tandis que l'animal en reste à la mémorisation de ses expériences. Il y a en nous des idées qui ne viennent pas des sens, qui ne se laissent pas ramener à l'expérience. Ce sont en effet des vérités nécessaires et universelles qui nous permettent d'accéder à la certitude alors que nos sens ne nous donnent que des expériences particulières.

    née avec nous: parue en même temps que nous, en nous, en notre esprit. Les vérités éternelles sont innées, nous portons leur virtualité dans notre esprit sans que nous nous en apercevions, un peu comme dans la réminiscence de Platon selon laquelle des idées contemplées avant la naissance sont retrouvées par l'esprit.

    => Suivez l'articulation logique du texte: l'auteur établit sa thèse par un raisonnement: puisque ... et puisque ... il s'ensuit que (conclusion).

    les sens: l'expérience sensible que les sens autorisent.

    inductions: désigne des opérations qui "montent" de la constatation des faits à une loi empirique qui permet de les prendre ensemble. Par exemple tous les poids pèsent.

    jamais: à aucun moment, en aucun cas une vérité nécessaire ne peut être déduite de l'expérience sensible.

    apprendre: nous faire connaître.

    vérités: ici celles qui tiennent à des idées innées ou à l'utilisation de la raison. En effet, ces vérités sont nécessaires, elles ne peuvent pas ne pas être parce qu'elles ont en elles leur démonstration. Elles ont tout ce qu'il faut pour leur propre démonstration: elles sont donc partagées par tous les esprits.

    => Par exemple, une chose ne peut pas être, son contraire, sous le même rapport. (du même point de vue)

    universelle: désigne ce qui tourné vers tous, ce qui est partagé par tous ceux qui pensent. L'affirmation: une chose ne peut pas être son contraire est universellement reconnue et certaine.

    ce qui est: l'expérience ne nous apprend que ce qui apparaît dans la réalité.

    ce qui se trouve: ce qui peut se découvrir dans des exemples particuliers qui se succèdent. Ainsi les prisonniers de la caverne de Platon voient des successions d'images sensibles, des consécutions.

    exemples particuliers: expériences qui relèvent de l'individualité, de ce qui aurait pu ne pas être, de ce qui est donc contingent: comment ce qui est contingent pourrait-il nous apprendre quelque chose de ce qui est nécessaire? Comment l'incertain pourrait-il nous donner la certitude? D'une suite d'exemples particuliers on ne tirera jamais une vérité universelle et nécessaire.

    et puisque: et parce que, étant donné que...

    nous connaissons:
    nous avons en nous présent à l'esprit.

    cependant: bien que cela ne vienne pas des sens. Puisque l'expérience ne nous donne que des exemples, d'où viennent les vérités nécessaires que nous utilisons: d'où vient notre raison comme pouvoir de distinguer le vrai du faux?
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  4. #4
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    vérités nécessaires: parce qu'elles portent en elles mêmes leur démonstration. Par exemple, les principes de la raison: identité, causalité, contradiction. ou encore en logique, le syllogisme: si... or... donc = (Majeure, mineure, conclusion)

    => Comprendre que nous ne voyons jamais l'identité, nous la portons en nous dans notre esprit, comme une vérité innée, une lumière que nous utilisons, innée parce que l'expérience ne nous a jamais montré deux choses identiques. Même les jumeaux sont différents par l'espace qu'ils occupent.

    des sciences: terme à prendre au sens large, mathématique, logique...

    privilégiés: que nous possédons en propre et dont les bêtes ne disposent pas. Les bêtes sont certes capables de prévoir parce qu'elles éprouvent entre les événements des consécutions ce qui leur permet de s'attendre à un événement qui était lié à un autre dans le passé. L'empirisme qui affirme que les idées ont pour origine les sens est vrai pour les animaux. Le privilège de l'homme ce sont les vérités nécessaires qui fondent sa raison. L'animal subit le changement alors que l'homme peut pénétrer, si son esprit est actif, les raisons du changement.

    il s'ensuit queon, nous arrivons à la conclusion du raisonnement démonstratif: une déduction selon un enchaînement bien conduit.

    tiré: nous avons puisé.

    ces vérités: les vérités nécessaires et universelles.

    en partie: le deuxième alinéa explicitera cela. L'expérience est nécessaire, il faut une sollicitation étrangère sans laquelle les virtualités innées ne seraient pas développées: sans l'expérience, nous ne penserions pas.

    ainsi: introduit à l'appui de ce qui vient d'être dit la maïeutique de Socrate qui n'a un sens que si la raison est en tous les esprits. Par la seule raison l'esclave Ménon retrouve en lui les vérités nécessaires et donne la solution de la duplication du carré. "C'est toi qui le diras", résume la méthode de Socrate.

    sans rien lui dire: en réalité dans le dialogue de Platon, Ménon, Socrate fait plus que suggérer la solution en épargnant àbl'esclave de l'invention de la règle opératoire nécessaire à la solution.

    autre matière: ce que Platon appelle les sciences auxiliaires dans le Livre VII de la République.

    dans le présent état: en ce monde, nous ne sommes pas de purs esprits... Les sens sont donc un condition nécessaire pour penser. Une condition nécessaire mais pas suffisante.

    nécessaire: en effet, la virtualité des vérités nécessaires doit être activée à l'occasion des expériences. Sans l'expérience, elles resteraient virtualités inconscientes et nous ne penserions pas.

    Mais ce qui est nécessaire: ce qui est exigé pour que quelque chose apparaisse: la condition nécessaire.

    les sens: ne fait pas complètement la nature de la chose: ce n'est pas une cause totale.

    => On peut donc maintenir qu'il y a en nous des idées qui ne viennent pas des sens, qui ne se laissent pas ramener à l'expérience, et en même temps qu'elles restent des virtualités sans l'expérience qui est condition nécessaire de leur développement.
    Leibniz prend un exemple très clair. Sans l'air, nous ne vivrions pas, mais il serait ridicule de dire que la vie n'est rien d'autre que de l'air...

    les sens: il y a quelque chose qui est tiré des sens, dans la pensée la plus abstraite, il y a des images. Mais il faut maintenir que cette condition nécessaire n'est pas suffisante car le raisonnement relève de l'esprit et des trésors de virtualités qui sont en lui. On comprend que l'esprit est toujours actif.

    ...le raisonnement demande encore autre chose que ce qui est sensible: par exemple l'identité, la causalité, la contradiction, la nécessité ... tout ce que l'on ne peut tirer de l'expérience.
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  5. #5
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    Cela nourrit la thèse.

    Hume pourra être une aide pour l'antithèse.

    Hume a été inspiré par le scepticisme antique sans pour cela se laisser entraîner jusqu'au doute absolu: il campe plutôt sur une position qui consiste à affirmer que la croyance prend une grande part dans le savoir. En affirmant, Hume échappe au scepticisme absolu.
    Il reprend le projet de Newton avec pour objet la nature humaine: avec Newton il se méfie des hypothèses hasardeuses et des prétention dogmatiques de la métaphysique, ce qui revient à donner le premier rôle à [COLOR="blue"]l'expérience comme origine des idées: les idées ne sont que les copies des impressions sensibles. L'association des idées relève de l'habitude, de l'expérience d'abord parce que les idées sont les traces, amorties pour ainsi dire, des impressions sensibles et ensuite parce que leur association naît de l'habitude comme expérience d'une consécution entre les impressions sensibles[/COLOR].
    A suivre
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

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