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Discussion: Cervantes un philosophe,certes! Et vlan sur le pif.

  1. #1
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    Par défaut Cervantes un philosophe,certes! Et vlan sur le pif.

    Le style de Cervantès Termes appropriés, aisance.
    Poésie, harmonie
    Noblesse du ton
    L'esprit de Cervantès Ambiguïté, équivoque.
    Doute, ironie
    => un philosophe.
    L'Espagne éternelle Goût de l'action gratuite, de la folle aventure.
    Dépouillement mystique du siècle d'or ("Je veux voir Dieu")
    Démesure dans les exploits
    Fascination pur les enchantements
    Sens de la dignité, noblesse
    Goût des échanges verbaux ...
    => Socrate
    Les valeurs de Cervantès


    Humilité, pauvreté, vérité
    Bonté, tolérance
    => Socrate
    Intransigeance sur la justice
    Don de soi (par exemple, abnégation du valet, Sancho Panza qui pour le "bonheur" de Don Quichotte le supplie de "repartir" et de ne pas se résigner => Qualité du philosophe)
    Sacrifice.= > Mort de socrate


    En figurant Cervantes se figure
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

  2. #2
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    Par défaut Comment comprendre?

    => Le problème auquel Cervantès s'attaque, avec la parfaite maîtrise d'un auteur universel peut donc se résumer ainsi: comment peindre une vie pleinement humaine, une vie de noblesse, sans pour cela répudier cette réalité prosaïque à laquelle elle se heurte? Sans pour cela perdre de vue que la déraison elle même a ses raisons, sans exclure ce qui exige de nous une reprise dans l'imaginaire, un effort de compréhension et de tolérance; et, plus que cela, de la bonté.
    Ainsi lorsque Don Quichotte et Sancho parlent d'irréalités, cela se fait dans un langage dont la forme est partagée par tous: on se comprend, dans un respect mutuel qui rapprochent ceux qui semblent le plus éloignés et leur permet de vivre ensemble.
    Bien plus qu'un simple respect qui n'est que trop souvent respect humain, cela implique cette trilogie fondatrice qui ne cesse d'affleurer dans Don Quichotte, la bonté, la justice et la charité, toutes les trois ordonnées à l'indépendance, la valeur des valeurs.

    Parce que une vie humaine ne peut advenir que par l'affrontement, la rêverie, la résistance des conditions, dans une sorte d'échange, elle se déroulera sans jamais perdre le dialogue: voilà pourquoi Cervantès campe ses personnages par leurs paroles qui manifestent l'existence d'une vie propre.
    Tant que le dialogue continue, l'âme de l'Espagne est sauvée.

    La suite prochainement :" contre l'opinion et les puissances de l'imagination"
    Jo!
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  3. #3
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    Que nous dit un philosophe?

    "Si l'on entend ce mot selon l'usage, l'imagination n'est pas seulement , ni même principalement un pouvoir contemplatif de l'esprit, mais surtout l'erreur et le désordre entrant dans l'esprit en même temps que le tumulte du corps." Alain

    Tout philosophe mène un combat contre l'opinion qui affirme la vérité du sensible et traduit ses besoins en connaissances.

    Il ne faut donc pas confondre Cervantès et Don quichotte*: une telle confusion rendrait l'hispanisant aveugle.

    Cervantès, en bon philosophe, multiplie les dialogues comme mouvement de la pensée au point qu'il campe ses personnages par leurs paroles qui manifestent l'existence d'une vie propre.
    C'est l'âme de l'Espagne du siècle d'or.

    Quoique tous les deux soient nus, pour aisi dire, il faut les distinguer car Don quichotte ignore sa nudité alors que Cervantès en est conscient, ainsi Socrate dirait qu'il ne sait rien mais qu'il le sait.
    Par là Don Quichotte n'est pas un philosophe.

    =>Au paraître dont la suffisance ne suffit jamais, Cervantès préfère l'être réel qui, réduit à ses limites, se suffit pour peu qu'il ait* l'humilité de reconnaître ses insuffisances (Voir le dernier chapitre de l'oeuvre).. Paradoxalement cette humilité qui se détourne des mirages de l'imaginaire, qui amène Cervantès dans le Prologue à renoncer au pouvoir de l'imaginaire, à renoncer à paraître ce qu'il n'est pas, cette humilité dans son repli s'appuie sur le socle de l'être et peut alors donner une juste fierté, juste parce n'ayant plus rien à voir avec l'imitation, le copiage et avec l'orgueil, elle est bien ajustée à ce qui est.


    => Pour comprendre: raison et imagination. Dans la lucidité de la raison il y a bien, à l'origine, la déraison qui devient consciente de ce qu'elle est, qui perd sa naïveté, grâce à ce regard réflexif qui accompagne les rêveries les plus folles. Or l'imagination implique toujours, dès l'enfance, ce regard qui fait dire en plein jeu,[I], dit-on[/I] Quand cette lucidité disparaît, l'imagination et la raison disparaissent avec le bon sens, l'imagination devient déraison, naïveté, qui confond ce qui est absent avec ce qui est présent ( => confusion du héros ) ce que l'on imagine et ce que l'on voit. Alors la raison n'est plus raison au sens propre, n'est plus l'actualisation des potentialités de l'imagination, elle s'est dégradée en hallucinations

    A suivre : Le prologue.
    Jo
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  4. #4
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    L'âme de l'Espagne n'est autre que le dialogue.
    Dans le dialogue chacun cherche la vérité, dans un échange où chacun se reconnaît en reconnaissant l'interlocuteur comme son semblable. C'est un effort pour penser ensemble. Étudiez les dialogues de Don Qiuchotte et de Sancho , cela vous apparaîtra en pleine clarté.
    La pensée n'est autre qu'un dialogue.
    Plus profondément c'est avec le lecteur que Cervantès dialogue.



    Le prologue nous guidera dans la compréhension du projet de Cervantès.
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  5. #5
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    => L'intention du prologue:

    => Cervantès s'adresse au lecteur pour présenter son livre non pas comme on présente un de ses enfants devant lequel il serait aveugle au point de confondre les défauts avec les qualités, de remplacer ce qui est par de l'imaginaire, mais comme l'auteur d'un récit, capable de prendre de la distance, d'être lucide, et capable d'admettre les critiques; (comment un livre critique qui veut démolir l'imaginaire des romans de chevaleries, pourrait-il ne pas accepter la critique et chercher à tromper le lecteur?).

    Il ne s'agit donc pas de la génération naturelle dans laquelle l'auteur se serait investi en fonction d'un désir au point d'en faire une occasion d'exister dans l'imaginaire de l'autre et par contrecoup dans le délire romantique de son propre imaginaire, mais d'une oeuvre qui prend pour ainsi dire la liberté d'aller jusqu'à, éventuellement, déplaire au lecteur et .... même à l'auteur. Cela entraîne l'exclusion de l'esprit d'imitation et de l'orgueil, cela ouvre la porte à l'humilité qui est vérité. Si, dans l'amour paternel d'un père pour son enfant, l'imagination au service du désir a le pouvoir de transformer imaginairement la réalité en fonction du désir au point d'offusquer la perception et le jugement (les sottises de l'enfant sont des marques de jugement!), ce n'est pas le cas dans l'affection raisonnée qu'un beau-père peut porter à un enfant: dégagé du désir qu'a le père de paraître dans l'imaginaire des autres par ce qu'il a engendré, le parâtre admet plus facilement les défauts d'un enfant qui n'est pas issu de lui; il trouve même sa gloire dans cette acceptation des limites de son oeuvre n'imaginant pas que l'enfant soit pour lui autre chose que l'occasion d'exercer une affection gratuite. Il ne recherche pas que les "qualités" de l'enfant refluent sur lui même pour l'auréoler.

    A l'aveuglement du père pour son enfant s'oppose donc la simplicité et l'humilité du parâtre (= deuxième époux de la mère) qui porte sur l'oeuvre le même regard qu'il porte secrètement sur lui même, sur ce qu'il est: parce que le semblable produit le semblable, la production ne saurait combler le désir et l'imagination qui ne cesse d'étendre la mesure du possible.

    Quelle folie, aux yeux de Cervantès que de vouloir jouir de l'impossible!

    => Cervantès se présente comme celui qui est dépouillé, qui a connu la pauvreté du prisonnier qu'il a été de 1575 à 1580 et en 1597 et 1598. Réduit à lui même, "sec, rabougri, fantasque" il peut dire que Don Quichotte lui est semblable: "plein d'étranges pensées que nul autre n'avait eu avant lui." (Tome 1, p. 37). Remarquons que l'étrangeté de Don Quichotte en fait d'une certaine manière un original, pourquoi pas un marginal qui appelle la société à plus de bonté? La fin de la phrase nous renseigne bien sur cette considération de soi,de sa propre valeur qu'il n'emprunte pas aux autres, la conscience de sa dignité et de la dignité de Don Quichotte qui habite Cervantès. Les qualificatifs nous renseignent en effet sur le physique et sur le moral de Don Quichotte, tel qu'en lui même, réduit à ce qu'il est, à son être, par le regard de Cervantès comme par le regard d'un mystique, dépouillé par la nuit des prisons, soucieux de mettre toujours la réalité à l'abri des feux d'artifices imaginaires.

    Ce qui distingue Cervantès de son personnage:
    Si Cervantès est conscient de cette nudité, Don Quichotte ne l'est pas et son illusion consiste à vouloir parer cette nudité de ce qui n'est pas. Le récit , celui du passage de l'illusion à la désillusion, est conduit pat l'auteur, avec le constant souci de dénoncer le médiateur, Amadis en particulier.
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  6. #6
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    Gardons bien en mémoire:

    Lorsque Don Quichotte et Sancho parlent d'irréalités, cela se fait dans un langage dont la forme est partagée par tous: on se comprend, dans un respect mutuel qui rapprochent ceux qui semblent le plus éloignés et leur permet de vivre ensemble.
    Bien plus qu'un simple respect qui n'est que trop souvent respect humain, cela implique cette trilogie fondatrice qui ne cesse d'affleurer dans Don Quichotte, la bonté, la justice et la charité, toutes les trois ordonnées à l'indépendance, la valeur des valeurs.
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  7. #7
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    Pour une lecture du chapitre premier:
    => Le chapitre premier est comparable à une scène d'introduction qui doit intéresser, donner des informations, annoncer l'action: on peut donc l'étudier selon son intérêt littéraire, l'art du romancier, son intérêt psychologique et son intérêt dramatique (drama = action). Bien entendu la lecture d'un prépas doit être particulièrement attentive à l'intérêt psychologique, puisque Cervantès va produire une psychologie de l'illusion et que le thème de l'année est, on le sait, puissances de l'imagination.

    => D'emblée Cervantès campe un personnage avec réalisme, par des notations bien ajustées à la réalité, à ce qui peut être perçu et donc sans faire appel à l'imagination: le lieu est un village et ce que possède le personnage est présenté avec réalisme, sans aucun fard qui prêterait à rêver: la simplicité frugale de sa table, ses deux habits, un pour la fête, un autre pour le quotidien; tout cela absorbe son revenu ce qui exclut la fantaisie ou l'éclat du paraître.

    => Celui qui s'appellera Don Quichotte est d'abord présenté dans la vérité de sa condition, en un village quelconque dont il n'y a rien à dire au point qu'on peut omettre de dire son nom sans grande perte pour l'imagination et le récit; un gentilhomme pauvre: la lance est au râtelier, ne sert donc plus à la guerre ou à la parade guerrière; le bouclier est démodé, la femelle du lièvre bonne à courir avec le chasseur, et un mauvais cheval aux flans creusés par la maigreur due à une nourriture rare et frugale.

    Simplicité, pauvreté mais aussi vérité de celui qui ne cherche pas encore à paraître.

    => Trois lignes pour l'entourage proche.
    Une gouvernante qui, en perdant la grâce de la jeunesse, ne suscite pas le désir, une nièce jeune, et un valet bon à tout. Pas de quoi porter au rêve ou à la passion.
    Pourtant le personnage intéresse ce qui nous laisse à prévoir qu'il pourrait bien s'évader, échapper au donné décevant qui l'entoure, fuir ce qu'il perçoit en exerçant sa liberté, en plongeant dans l'irréel vers des satisfactions toujours nouvelles, vers une nouvelle vie; on pressent qu'il est prêt ou qu'il se prépare à abandonner le cours ordinaire de sa vie trop bien rythmée; prêt à se dégager de la réalité.

    Ce qui nous oriente vers l'imaginaire et qui nous laisse deviner que le personnage étouffe un peu, c'est la "constitution robuste" et cette activité matinale: ne peut-on pas tout attendre d'un être robuste qui se lève tôt car il est fort et résistant sur le plan physique comme sur le plan moral?
    Notez la progression ascendante, corps => visage => énergie morale, et dans les trois cas remarquez que la personnalité, la liberté, la volonté sont suggérées par les qualificatifs: secs, maigre, matinal, grand.

    => En bref, un personnage peu banal, englué dans l'ennui d'une quotidienneté rythmée par le retour d'un même temps fort, la fête probablement religieuse ou par la chasse qui, -que Don Quichotte en soit conscient ou pas- est une figure de la fuite, de la conquête, de la gloire.
    En acte, il n'y a pas grand chose, mais en puissance, nous imaginons des capacités qui ne demandent qu'à se réaliser grâce la volonté morale qui laisse présager les grandes aventures.

    => Cervantès fait alors une pose pour s'interroger sur le nom de son personnage, pour s'attarder, pour nous dire en fin de compte que cela importe peu. Cette pause, n'est-ce pas l'art du conteur qui la ménage? Il sait faire attendre, il laisse un silence tout en écrivant pour que le lecteur puisse laisser retentir le début, attendre: c'est à dire faire attention à ce qui va suivre en s'interrogeant sur ce qui peut bien arriver dans ce monde d'habitudes. Or, marquera une rupture, mais on comprendra l'intérêt de Don quichotte pour la lecture des romans de chevalerie.
    Dans Le Chercheur d'or, Le Clézio ne nous dit-il pas: "Quand la vraie vie n'existe pas, on rêve de la liberté."
    Qu'est-ce qui peut bien arriver dans cette vie fermée sur elle, dans le retour à intervalles réguliers de la fête ou de la chasse qui désespère cette vie , sinon la prise de conscience de ce que la vraie vie est ailleurs, sinon une explosion comme expansion de la liberté, cette liberté que nous devons à l'imaginaire qui nous permet de nous arracher aux perceptions décevantes. Si la vraie vie est ailleurs, c'est que nous l'imaginons ailleurs et cet ailleurs pour Cervantès et son héros sera la lecture, la lecture des romans de chevalerie et au cours de L'Odyssée, la lecture de la réalité par l'imagination tout au long du périple de Don Quichotte.
    Nous voilà prêt à admettre que le personnage passe la plupart de son temps à plonger dans les rêveries de roman de chevaleries, au point qu'il sera assez fou pour croire qu'un voyage permet de goûter "dans une réalité le charme d'un songe." Proust, Du côté de chez Swann, I, 13 et suivante.
    Jo
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  8. #8
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    Pages suivantes pour le chapitre premier:
    A partir de:
    http://www.philagora.net/ph-prepa/po...cervantes5.php

    Page 2 . S'absenter, abandonner le cours ordinaire des choses
    Page 3 . Avant de s'élancer vers une vie nouvelle
    Page 4. L'imagination et l'institution
    Sur un entretien aves Monsieur Besnier , dans la prestigieuse revue, Sciences et Avenir

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