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L***8217;homme est homme par son pouvoir d***8217;affronter ses besoins et de se sacrifier. Or cela doit être constitutionnellement possible, c***8217;est-à-dire inscrit dans la nature même du besoin. Si je ne suis pas maître du besoin comme manque, je peux le repousser comme raison d***8217;air. C***8217;est dans cette épreuve extrême que l***8217;homme montre son humanité. Déjà la vie la plus banale esquisse ce sacrifice : ce que l***8217;on a appelé la « socialisation des besoins » suppose que le besoin se prête à une action corrective exercée sur lui par les exigences d***8217;une vie proprement humaine (coutumes, règles de politesse, programme de vie***8230;) Mais c***8217;est l***8217;expérience du sacrifice qui est la plus révélatrice ; les récits d***8217;expéditions au pays de la soif ou du froid, les témoignages de combattants sont la longue épopée de la victoire sur le besoin. L***8217;homme peut choisir entre sa faim et autre chose. LA non-satisfaction des besoins peut non seulement être acceptée mais systématiquement choisie : qui tel eut sans cesse le choix entre une dénonciation et un morceau de pain préféra l***8217;honneur à la vie. ; Et Gandhi choisit de ne pas manger pour fléchir son adversaire. La grève de la faim est sans doute l***8217;expérience qui révèle la nature vraiment humaine de nos besoins comme, en un certain sens, la chasteté (monacale ou autre ) constitue la sexualité en sexualité humaine. Ces situations extrêmes sont fondamentales pour une psychologie de l***8217;involontaire. Le besoin peut donc être un motif comme un autre.

Paul RIcoeur , le volontaire et l'involontaire 1950