Laminoirs et Hauts – fourneaux.


Nostalgie.

Flânons en remontant le temps
Que la mémoire souvent rumine
Les compagnons des temps d’usine
Qui se pressaient, café « passe-t’en ».
Un foulard gris sur le museau
Avec la fringale aux boyaux.
Rêveurs, sensibles aux boniments,
Chez les vendeurs de pacotille.
Où le bonheur est à bas prix
Penser enfin aux bons moments…

L’équipe du matin.

Tout est déjà plus transparent
Que les relents des matins sombres.
Où l’on voit défiler les ombres
Qui s’écartent, rideaux déchirants.
Ami, qui chantent en de si tristes rues ?
Des vies cassées, courbées et nues.
Qui cherchent au bout de leurs pas lourds
L’éclat d’or pur d’un nouveau jour.
Les voix se mêlent en un écho
Soufflant en chœur un air idiot.

L’Usine.

Les laminoirs écrasent les cœurs
De ce peuple aux bras tatoués.
Et chaque gars rêvent à la fleur
Qu’il trouvera sous les déblais.
On refuse ici les promesses
Autant qu’une pitié de nanti
L’usine est prise sans faiblesse
Et ne tolère aucun répit
A ceux qu’elle transforme en poussière.

La réunion.

On y sent chanter l’espoir…
Les mains encore à peine tendues
Vers un futur de grand soir
Où s’orneront les avenues
Mais sur les tables des bistrots
Elles frémissent toutes, lourdes, impatientes…
Tant de travail, et plus, et trop…
En terminer ! fureur rampante.
Les mains se ferment en poings marteaux.

La grève.

Le Haut-fourneau est silencieux.
Avec ses scories sur nos jours
La rouille fait rougir nos yeux
Le ciel est vide et le vent lourd.
Les gens avisés, bardés de certitude
Dont la faconde abat tous les maux.
Offrent leurs lots de solitude
Le marché se moque des mots.
Devant nous, les heures glacées, l’incertitude.

Le refuge.

Comme une jonquille à peine éclose
D’un printemps laissé en jachère
Sur mon ventre, douce, tu te poses
Et fait vaciller ma misère.
Ayant, pour un temps, un nid à ma taille.
Le panier de tes bras protège du dehors.
Me libère la tête et me lave le corps.
Bien loin d’un univers de fonte et de ferraille.
Misérable, je suis, mais vois… Je rêve encore.