Du psychique "autonome" et de son "environnement"...
Pour Guénon, derrière les forces de la nature, il existe "quelque chose d'un autre ordre, dont elles ne sont réellement que le véhicule et comme l'apparence extérieure"; autrement dit, des "entités psychiques" dont les modernes, limités par leurs conceptions "scientistes", ne soupçonnent même pas l'existence.
Mais, plus encore que dans le domaine matériel et social, c'est dans le domaine psychique que Guénon reconnaît les signes de l' "âge sombre". Des auteurs traditionnalistes, constatant que certaines manifestations d'influences subtiles se manifestent de plus en plus ouvertement, croient pouvoir s'en réjouir en y voyant le signe d'une disparition du matérialisme.
Mais Guénon répond qu'il s'agit là d'une substitution au matérialisme de quelque chose de plus grave encore. Car si le matérialisme, ou plus précisément "la négation qu'il représente", a servi efficacement à interdire à l'homme l'accès des possibilités d'ordre supérieur, elle ne saurait déchaîner les forces inférieures qui seules peuvent mener à son dernier point l'oeuvre de désordre et de dissolution.
Ce qui revient à dire ceci ; il y a pire que le refus de toute spiritualité, et c'est la pseudo-spiritualité, la spiritualité à rebours. C'est cette pseudo-spiritualité qui aura pour principale fonction de faire pénétrer dans le monde "les forces dissolvantes et destructives du domaine subtil inférieur", celles-ci devant provoquer la "subversion" annonciatrice de la fin de notre période cyclique.
Une parodie illusoire du spirituel.
Le caractère essentiel de cette "pseudo-spiritualité" est d'être "parodique" ; elle imitera les aspects de la spiritualité véritable, mais non sans que cette imitation ne comporte "un élément grotesque" qui ne saurait échapper à des observations "non suggestionnées".
De cette parodie, René Guénon cite plusieurs exemples pris dans le "domaine public" : "les pseudo-rites "civiques" et "laïques", qui visent à fournir à la "masse" un substitut purement humain des vrais rites religieux... ; le "naturalisme"... "dont le véritable propos est de faire croire que l' "état de nature" se confond avec l'animalité"... ; "l'organisation des loisirs"..., "idée contradictoire en elle-même et qui menace... le simple repos de l'être humain".
L'une des plus frappantes caractéristiques de la "pseudo-spiritualité" est la confusion qu'elle commet entre les domaines "psychique" et "spirituel". Cette confusion, remarque Guénon, est déjà ancienne, si l'on songe que Descartes "confondait en une même entité tout ce qui n'est pas le corps, cette entité étant indifféremment désignée par les termes d' "âme" et d' "esprit".
De nos jours, cette confusion est devenue familière, où le nom d' "esprit" est donné couramment "à des entités psychiques qui n'ont certes rien de spirituel". On peut d'ailleurs commettre la confusion du psychique et du spirituel de deux manières : soit en réduisant le spirituel au psychique (ce qui est le fait d'une certaine psychologie moderne), soit en prenant au contraire le psychique pour le spirituel.
La seconde confusion est sans doute plus dangereuse que la première, car elle conduit ceux qui la commettent à se donner l'illusion de la spiritualité, alors qu'ils obtiennent des résultats d'ordre purement "sensible".