Le mythe de Sysiphe, l'euthanasie
Pour saisir le suicide il est nécessaire, comme chaque fois lorsque l'on fait oeuvre de philosophie, d'abstraire le sujet de la contingence du réel, du particulier. Le suicide n'a rien à voir avec l'euthanasie, même si par l'euthanasie une certaine idée du suicide perce. Par le suicide s'explique l'euthanasie, et non l'inverse; reste donc encore à définir le suicide pour lui-même. Il est important je pense de sortir à tout prix du particularisme, sans pour autant tomber dans un platonisme frénétique.
Qu'est ce que le suicide? Je renvois à cette question de Camus dans son mythe de Sisyphe, "il n'y a qu'un problème philosophique vraiment sérieux, c'est le suicide", qu'est ce que cela voulait dire? La réponse de Camus constitue t-elle une réponse convaincante à ce problème grave? Je serai ravi d'approfondir cette conversation avec vous messieurs dames, si vous en manifestez un quelconque intérêt.
Cordialement.
L'étranger et l'angoisse d'un monde sans Dieu
Comme toujours le kantisme est, aussi surprenant que cela puisse paraître, manichéen au possible. Absence de bonheur n'est pas la souffrance, et d'avantages encore s'il est également absence de malheur.
En un mot, c'est ce que Camus appelle l'absurdité, terme qui l'a d'ailleurs vu rattaché injustement au mouvement existentialiste (Sartre a vu dans l'absurdité sa fallacieuse "angoisse Heideggerienne", semble t-il, à savoir l'incompréhension amère d'un homme lambda qui découvre qu'il vit dans un monde sans dieu, ou dans un monde où le créateur et sa créature se sont abandonnés l'un et l'autre; le mythe berçant pour l'artiste mais improductif pour des exigeances philosophiques).
L'absurdité, c'est le ni bien ni mal, la désadhérence à l'action, une perte d'un certain rythme d'existence au profit d'un rythme plus intérieur, mais plus vide, car isolé. L'étranger de Camus illustre l'histoire de cet homme qui agit, vit, pense à vide : c'est un roman du vide. Petit à petit le sujet se désinvesti du monde, le champ social devient une aire de situations dans laquelle s'exprimer en passivité n'est même plus prendre position. A quoi voit-on que l'on prend position si d'hors et déjà on n'est "plus personne"?
Si cette discussion vous intéresse, je serais ravi de la reprendre avec vous.
Cordialement.
La décrépitude : forme de désadhérence ?
Ce que je veux dire, c'est que n'être pas heureux ne signifie pas pour autant être en souffrance. On peut très bien se trouver dans un état de lassitude, de décrépitude morale sans que cela soit un émoi schillerien.
Pouquoi le "d'avantages s'il est absence de malheur"? Parce qu'il peut arriver qu'on ne soit pas heureux sans trouver des raisons pour l'expliquer (famille équilibrée, alimentation saine, éducation ni trop rigoureuse ni trop laxiste, pratique d'un sport, que sais-je encore), on ressens simplement un manque, mais un manque inverbalisable, et qui, avec le temps, finit par vous faire perdre la tête.
Dans cet état le sujet est confronté au monde dans un certain rapport que Camus appelle effectivement l'absurdité : c'est plus que se regarder pédaler, c'est se regarder en train de se regarder pédaler, si vous voulez. C'est d'une forme de désadhérence au monde dont il s'agit, on ne "colle" plus à l'action, on est là sans être là. Et la vie s'écoule comme une rêverie lente, anesthésiée par des plaisirs fats, éphémères.
Cordialement.