§. XI
Le jugement de goût n'a pour principe que la forme de la finalité d'un objet (ou de sa représentation).
Toute fin, considérée comme un principe de satisfaction, renferme toujours un intérêt comme motif du jugement porté sur l'objet du plaisir. Le jugement du goût ne peut donc avoir pour principe une fin subjective. Il ne peut être non plus déterminé par la représentation d'une fin objective ou d'une possibilité de l'objet même fondée sur les principes de la liaison des fins, et par conséquent par un concept du bien ; car ce n'est pas un jugement de connaissance, mais un jugement esthétique, qui ne concerne aucun concept de la nature ou de la possibilité interne ou externe de l'objet, dérivant de telle ou telle cause, mais simplement le rapport de nos facultés représentatives entre elles, en tant qu'elles sont déterminées par une représentation.
Or ce rapport, qui se manifeste quand nous regardons un objet comme beau, est lié avec le sentiment d'un plaisir auquel nous reconnaissons par le jugement de goût une valeur universelle ; par conséquent, il ne faut pas plus chercher la raison déterminante de cette espèce de jugement dans une sensation agréable, accompagnant la représentation, que dans la représentation de la perfection de l'objet et dans le concept du bien. La finalité subjective et sans fin (ni objective, ni subjective) de la représentation d'un objet, par conséquent la simple forme de la finalité dans la représentation par laquelle un objet nous est donné, en tant que nous en avons conscience, voilà donc ce qui seul peut constituer la satisfaction que nous jugeons sans concept comme pouvant être universellement partagée, et par conséquent le motif du jugement de goût.